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 vous accompagne dans l’hommage aux dĂ©funts. Les faire-part de dĂ©cĂšs et d’obsĂšques de la ville de Dunkerque À l’instar des avis de dĂ©cĂšs diffusĂ©s au niveau national, l’annonce pour une personne dĂ©cĂ©dĂ©e dans la ville de Dunkerque mentionne les informations essentielles Nom et prĂ©nom de la personne dĂ©cĂ©dĂ©e Date et ville du dĂ©cĂšs Un faire-part plus dĂ©taillĂ© peut Ă©galement ĂȘtre mis en ligne ModalitĂ©s liĂ©es Ă  la cĂ©rĂ©monie d’obsĂšques type et lieu de la cĂ©rĂ©monie funĂšbre – obsĂšques civiles ou religieuses ; type et lieu des obsĂšques – inhumation ou crĂ©mation ; demandes spĂ©cifiques du dĂ©funt ou de la famille – ni fleurs, ni couronnes
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 Tout est fait pour aider les familles Ă  rendre le meilleur hommage possible Ă  leur proche dĂ©funt. Soins de conservation Transport dĂ©funt Photos de l'Ă©tablissement Accessoires funĂ©raires et urnes Organisation funĂ©raire Gestion et utilisation des chambres funĂ©raires Prestations en marbre Demande de devis en ligne Jours de permanence Supply Personnel Items Services Prix moyen des obsĂšques dans le departement Tarifs moyens pour l'inhumation Voir le dĂ©tail Fermer Frais avancĂ©s pour le compte de la famille Prestations courantes Voir le dĂ©tail DĂ©marches & formalitĂ©s 227 € Ouverture / fermeture caveau porte 483 € Toilette mortuaire prĂ©paration et habillage du dĂ©funt 168 € Corbillard et chauffeur convoi funĂ©raire 304 € Cercueil avec cuvette Ă©tanche et quatre poignĂ©es standard 669 € Personnel pour inhumation 96 € Prestations complĂ©mentaires optionnelles Voir le dĂ©tail MaĂźtre de cĂ©rĂ©monie 146 € Prestations courantes Prestations complĂ©mentaires optionnelles Frais avancĂ©s pour le compte de la famille CĂ©rĂ©monie funĂ©raire Frais de culte 215 € Porteurs 269 € MaĂźtre de cĂ©rĂ©monie 146 € Corbillard et chauffeur convoi funĂ©raire 304 € DĂ©marches & formalitĂ©s DĂ©marches & formalitĂ©s 227 € Toilette mortuaire prĂ©paration et habillage du dĂ©funt 168 € Inhumation Ouverture / fermeture caveau porte 483 € Personnel pour inhumation 96 € Cercueil et Accessoires Capiton standard 87 € Cercueil avec cuvette Ă©tanche et quatre poignĂ©es standard 669 € Mise en biĂšre Mise en biĂšre 112 € Estimation moyenne 2776 € *sources Tarifs moyens pour la crĂ©mation Voir le dĂ©tail Fermer Frais avancĂ©s pour le compte de la famille Prestations courantes Voir le dĂ©tail DĂ©marches & formalitĂ©s 227 € Dispersion des cendres 40 € Toilette mortuaire prĂ©paration et habillage du dĂ©funt 168 € Corbillard et chauffeur convoi funĂ©raire 304 € Cercueil avec cuvette Ă©tanche et quatre poignĂ©es standard 669 € Prestations complĂ©mentaires optionnelles Voir le dĂ©tail MaĂźtre de cĂ©rĂ©monie 146 € Prestations courantes Prestations complĂ©mentaires optionnelles Frais avancĂ©s pour le compte de la famille CrĂ©mation CrĂ©mation adulte 568 € Urne 89 € Dispersion des cendres 40 € CĂ©rĂ©monie funĂ©raire Frais de culte 215 € Porteurs 269 € MaĂźtre de cĂ©rĂ©monie 146 € Corbillard et chauffeur convoi funĂ©raire 304 € DĂ©marches & formalitĂ©s DĂ©marches & formalitĂ©s 227 € Toilette mortuaire prĂ©paration et habillage du dĂ©funt 168 € Cercueil et Accessoires Capiton standard 87 € Cercueil avec cuvette Ă©tanche et quatre poignĂ©es standard 669 € Mise en biĂšre Mise en biĂšre 112 € Estimation moyenne 2894 € *sources *sources Quels sont les tarifs moyens des obsĂšques dans le dĂ©partement du Nord ? Gardez bien Ă  l’esprit que les informations donnĂ©es dans les tableaux ci-dessus servent d’indication. Le prix des obsĂšques peut ĂȘtre modifiĂ© en fonction d’un certain nombre de facteurs, comme par exemple le nombre et la qualitĂ© des prestations funĂ©raires choisies par la famille, et les tarifs appliquĂ©s au sein de l’agence funĂ©raire l’État n’a pas de contrĂŽle sur les prix appliquĂ©s dans le funĂ©raire, ce qui laisse le champ libre aux agences. Vous dĂ©sirez connaĂźtre prĂ©cisĂ©ment le tarif d’obsĂšques personnalisĂ©es ? N’attendez plus et utilisez notre comparateur de devis en ligne, 100% gratuit et sans engagement ! Quels sont les moyens de paiement acceptĂ©s par l’agence de Pompes FunĂšbres Roc-Eclerc ? L’agence Pompes FunĂšbres Roc-Eclerc accepte les rĂšglements en carte bleue, chĂšque et espĂšces. AccĂ©der Ă  l'Ă©tablissement Photos de l'Ă©tablissement Accompagnement Prestation RĂ©activitĂ© Prix Comparer les agences proches Pompes FunĂšbres Coffin 28 bis, rue Henri Russel, 62380 Lumbres 3 avis Pompes FunĂšbres Daniel BĂ©e 8 bis Rue François Cousin, 62380 Lumbres, France, 62380 Lumbres 1 avis Pompes FunĂšbres Laurent LAHEYNE 17,rue de la LibĂ©ration, 59122 Hondschoote Pompes FunĂšbres Josien 125, route de Guarbecque, 62350 Saint-Venant Marbrologie Avenue Jean Monnet – ZAC du Pont Loby, 59140 Dunkerque Pompes FunĂšbres GĂ©nĂ©rales 1,avenue LĂ©on Jouhaux, 59820 Gravelines Avis des internautes 9 Les avis sont certifiĂ©s afin d'Ă©viter le trucage. Ils proviennent de personnes qui ont utilisĂ© nos services et sont passĂ©es par l'Ă©tablissement. Tous les avis positifs et nĂ©gatifs sont publiĂ©s. Si les notes sont bonnes, c'est que nous vous conseillons des prestataires de qualitĂ©. 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Fils de Louis XIII, il naquit le 16 septembre 1638, aprĂšs vingt-trois annĂ©es d’un mariage stĂ©rile. Cette circonstance lui fit donner le surnom de DieudonnĂ©, qu’on oublia pendant la guerre civile de la Fronde et qu’il fit oublier encore plus quand il rechercha et obtint le nom de Grand. Il n’avait que cinq ans lorsque la mort de Louis XIII l’appela sur le trĂŽne, en 1643. Les troubles de la minoritĂ© sont liĂ©s Ă  Anne d’Autriche, la duchesse de Longueville, Mazarin, le cardinal de Retz, Turenne, etc. Nous ne parlerons ici de ces troubles que pour observer leur influence sur le caractĂšre d’un roi qui, par l’action de sa volontĂ©, sut prendre tant d’empire sur les Ă©vĂ©nements du siĂšcle le plus illustre et se montra comme le bon sens qui commande au gĂ©nie. On a beaucoup dit que son Ă©ducation fut nĂ©gligĂ©e Ă  dessein et qu’il manqua des Ă©lĂ©ments de l’instruction la plus commune. Cette opinion mĂ©rite d’ĂȘtre examinĂ©e. On lui avait donnĂ© pour prĂ©cepteur l’un des hommes les plus distinguĂ©s de ce temps, PĂ©rĂ©fixe, Ă©vĂȘque de Rodez ce prĂ©lat Ă©crivit pour son royal Ă©lĂšve cette Vie de Henri IV qui, par l’intĂ©rĂȘt merveilleux du sujet, la candeur et la facilitĂ© de la narration et le parfum de vertu qui s’y fait sentir, est regardĂ©e comme un des chefs-d’Ɠuvre de la biographie moderne. Il n’est point Ă  prĂ©sumer que ce digne prĂ©lat pĂ»t ĂȘtre infidĂšle Ă  ses devoirs d’instituteur ; et n’était-ce pas en remplir les devoirs que de rendre familiers Ă  son Ă©lĂšve les exemples du meilleur et du plus grand des rois de sa dynastie ? Le jeune Louis, douĂ© d’un tempĂ©rament actif et vigoureux, de toutes les grĂąces et de tous les dons extĂ©rieurs, rĂ©ussissant Ă  merveille dans l’équitation, dans les armes, aux jeux du mail et de la paume, se montra moins appliquĂ© aux Ă©tudes sĂ©rieuses. Il apprit cependant le latin et il parlait avec facilitĂ© l’italien et l’espagnol. Les sociĂ©tĂ©s polies, les cercles brillants oĂč la reine sa mĂšre introduisit les agrĂ©ments et la galanterie du fameux hĂŽtel de Rambouillet, avec moins d’instruction et de pĂ©danterie, durent l’habituer de bonne heure Ă  un tact dĂ©licat et Ă  ce sentiment des convenances que depuis il unit si bien Ă  l’art de rĂ©gner. SĂ©rieux, timide, docile et bienveillant, il apprit Ă  Ă©couter, sans dĂ©daigner de plaire ; et la conversation devint pour lui un utile supplĂ©ment Ă  des Ă©tudes fort imparfaites. La guerre de la Fronde, qui contraria ses Ă©tudes, servit beaucoup Ă  son caractĂšre. DĂšs son adolescence, il ne vit autour de lui que les pĂ©rils du trĂŽne. Combien de fois n’entendit-il pas la reine sa mĂšre dĂ©plorer les intrigues des courtisans qu’elle avait comblĂ©s de ses dons, des favorites auxquelles elle avait confiĂ© ses pensĂ©es les plus intimes ! Quelle source continuelle d’étonnement et d’instruction pour cette jeune Ăąme qu’une guerre civile conduite par les dĂ©positaires des lois, que des sĂ©ditions et de nouvelles barricades commandĂ©es par un prĂ©lat ! Combien de fois ne fut-il pas troublĂ© dans ses exercices, dans ses jeux, par des pĂ©rils imminents, par des fuites prĂ©cipitĂ©es ! Que de mauvais gĂźtes ! que d’asiles peu sĂ»rs ! Le sort de ses jeunes annĂ©es semblait le mĂȘme que celui de l’enfance de Charles IX. On ne parlait que de l’arracher Ă  la reine sa mĂšre. L’évĂ©nement d’un combat pouvait le rendre prisonnier de courtisans rebelles qui lui auraient dictĂ© des ordonnances pour proscrire sa mĂšre. Il avait prĂšs de dix ans quand la guerre de la Fronde commença ; il en jugeait les divers Ă©vĂ©nements avec une sagacitĂ© d’esprit assez remarquable. Lorsque, au commencement des troubles parlementaires, la cour reçut la nouvelle de la victoire de Lens remportĂ©e par le grand CondĂ© sur l’armĂ©e espagnole VoilĂ , s’écria le jeune roi, une victoire qui va bien chagriner MM. du parlement de Paris. » Cependant la France pouvait citer, mĂȘme alors, quelques succĂšs extĂ©rieurs. Comme pour donner le prĂ©sage d’un rĂšgne ornĂ© et surchargĂ© de gloire militaire, cinq jours aprĂšs l’avĂšnement de Louis XIV au trĂŽne, le grand CondĂ©, alors duc d’Enghien, remportait Ă  vingt-deux ans la victoire de Rocroy, la plus glorieuse des journĂ©es qui eussent signalĂ© les armes françaises depuis les batailles de Bovines et de Marignan. Les victoires de Fribourg, de Nordlingen et de Lens, dues au mĂȘme hĂ©ros, le prĂ©sentaient comme l’hĂ©ritier du gĂ©nie, de la fortune et de la valeur de Gustave-Adolphe. S’il avait un rival, c’était dans les rangs de l’armĂ©e française qu’il fallait le chercher. Le vicomte de Turenne, avec des succĂšs moins brillants et moins constants, perfectionnait encore plus la tactique militaire et donnait Ă  la France le plus sĂ»r boulevard des empires, une excellente infanterie. La fortune voulut que ces deux hĂ©ros, qui avaient Ă©pouvantĂ© et accablĂ© les deux branches de la maison d’Autriche par des succĂšs noblement combinĂ©s, fussent opposĂ©s l’un Ă  l’autre sans inimitiĂ© dans la guerre civile et changeassent de rĂŽle et de parti, comme afin de pouvoir mesurer encore leurs talents militaires. La guerre de la Fronde fut tristement illustrĂ©e par la rivalitĂ© de ces deux grands capitaines, et n’eut pour ainsi dire d’autre rĂ©sultat que d’entretenir dans la nation un esprit guerrier, dĂ©jĂ  trop enflammĂ© par les succĂšs prĂ©cĂ©dents de ces mĂȘmes hĂ©ros. Au milieu de ces troubles, Mazarin eut la gloire de fonder le droit public de l’Europe, par le traitĂ© de Munster et par la paix de Westphalie, sur les bases les plus nobles que la politique pĂ»t se proposer ; car le seul but de ces deux traitĂ©s semblait ĂȘtre de protĂ©ger les petits États contre l’ambition des grandes monarchies. Les coups que le cardinal de Richelieu, que le hĂ©ros suĂ©dois, que les protestants d’Allemagne, que Turenne, CondĂ© et le cardinal Mazarin lui-mĂȘme avaient portĂ©s Ă  l’ambition et Ă  la puissance de la maison d’Autriche, avertissaient tout autre souverain qu’il n’était plus temps de songer Ă  la monarchie universelle. Mais la France s’élevait et la possession de l’Alsace, que l’heureux Mazarin lui avait assurĂ©e, ne semblait ĂȘtre que le premier essai de ses forces nouvelles. Tandis que l’empereur d’Allemagne se fĂ©licitait d’échapper par divers sacrifices et d’humiliantes concessions Ă  une vaste ruine, la branche autrichienne d’Espagne, plus fiĂšre, moins abattue, refusait d’entrer dans le traitĂ© de Westphalie, continuait la guerre et nous opposait ce mĂȘme prince de CondĂ© qui, dans quatre victoires, avait si cruellement chĂątiĂ© son orgueil. Mazarin jouissait alors d’une puissance absolue. La guerre civile cessa quand le parlement ouvrit les yeux sur le crime d’avoir appelĂ© les Espagnols Ă  son secours contre le roi, quand il sut apprĂ©cier le repentir lucratif des courtisans ; enfin, lorsque CondĂ©, bien peu digne alors du surnom de Grand, commanda ou laissa exĂ©cuter l’incendie de l’hĂŽtel de ville et le meurtre de quelques Ă©chevins signalĂ©s par leur esprit de modĂ©ration. Les bourgeois de Paris, qui s’étaient habituĂ©s Ă  de funestes combats, eurent assez d’honneur et de bon sens pour s’indigner et s’épouvanter des excĂšs de la multitude. Dans l’étourdissement gĂ©nĂ©ral et la lassitude commune, personne ne s’avisa de songer Ă  des stipulations pour la libertĂ© publique. Le cardinal n’eut qu’à faire semblant de subir un nouvel exil pour dĂ©sarmer les Parisiens ; et bientĂŽt ils le virent rentrer au Louvre sans Ă©tonnement comme sans terreur. La Fronde finit par rire d’elle-mĂȘme et de ses hĂ©ros. Mazarin ne se vengea qu’en mettant tout doucement la France au pillage, non au profit du roi, mais au sien il parut ne regretter que d’avoir Ă©tĂ© jusque-lĂ  trop dĂ©sintĂ©ressĂ©. La reine Anne trembla devant le favori qu’elle avait protĂ©gĂ© avec une constance si opiniĂątre et si pĂ©rilleuse. Mazarin sut habilement se servir des vertus naissantes et de l’esprit judicieux du jeune roi pour contenir son ardeur de gouverner. Louis XIV, attribuant au gĂ©nie de son ministre l’heureux dĂ©nouement de la guerre civile, crut que l’autoritĂ© absolue dont il devait recueillir l’hĂ©ritage avait Ă©tĂ© transmise par Richelieu Ă  Mazarin. Il considĂ©ra celui-ci comme un pĂšre, Ă  l’autoritĂ© duquel il ne pouvait succĂ©der qu’aprĂšs sa mort, et se prĂ©para par des Ă©tudes secrĂštes aux grands devoirs qui lui seraient alors imposĂ©s. Mazarin voulut, Ă  l’exemple de Richelieu, essayer de la gloire militaire. Il se rendit aux armĂ©es et s’y fit suivre par le monarque mais c’étaient encore Turenne et CondĂ© que l’on voyait en prĂ©sence ; et l’Europe s’aperçut Ă  peine du voyage militaire du cardinal et du roi. Entre les deux illustres rivaux, la fortune semblait toujours s’attacher Ă  celui qui soutenait la cause du devoir et de la patrie. CondĂ©, gĂ©nĂ©ral de l’armĂ©e espagnole, mais subordonnĂ© aux ordres d’un archiduc, fut rĂ©duit Ă  la gloire de sauver quelquefois une armĂ©e qu’il ne pouvait rendre victorieuse. Il vit les lignes de son camp forcĂ©es par Turenne devant Arras, les Espagnols battus une seconde fois devant les Dunes 1654 ; et cependant il parvint un peu Ă  balancer les avantages de la campagne. Le parlement de Paris, dans cet intervalle, avait manifestĂ© le dĂ©sir de se relever de l’humiliation oĂč il Ă©tait tombĂ©. Il refusait l’enregistrement de quelques Ă©dits bursaux. Louis, ĂągĂ© de dix-sept ans, se chargea d’aller intimider des magistrats qui l’avaient si souvent rĂ©duit Ă  la fuite. Il n’eut point recours Ă  l’appareil des lits de justice. Soit qu’il suivĂźt les instructions du cardinal, soit qu’il se livrĂąt Ă  l’emportement d’un jeune prince enivrĂ© de son pouvoir, il se rendit au parlement prĂ©cĂ©dĂ© de plusieurs compagnies de ses gardes, en Ă©quipage de chasse, un fouet Ă  la main, et commanda l’enregistrement avec des paroles hautaines et menaçantes. Le parlement obĂ©it et dĂ©vora en silence cet affront. Louis sut depuis s’abstenir de ces bravades despotiques. Du reste, il se montrait ou paraissait encore entiĂšrement livrĂ© aux goĂ»ts de son Ăąge. Les filles d’honneur de la reine mĂšre Ă©taient les objets de ses intrigues galantes. La duchesse de Navailles, chargĂ©e de veiller sur leur conduite, fit murer une porte par laquelle le roi avait Ă©tĂ© quelquefois furtivement introduit. Le respect filial le fit renoncer Ă  des entreprises que la reine condamnait avec sĂ©vĂ©ritĂ©. Mais bientĂŽt un amour plus sĂ©rieux, et qui menaçait de plus prĂšs la dignitĂ© du trĂŽne, alarma cette reine fiĂšre et prudente. Marie Mancini, la seule des niĂšces du cardinal qui fĂ»t dĂ©pourvue d’attraits, toucha le cƓur de Louis par une conversation vive, spirituelle, et par toute l’exaltation d’un esprit romanesque. Dans de frĂ©quents entretiens, que le cardinal favorisait et dirigeait peut-ĂȘtre, elle rĂ©ussit Ă  subjuguer le roi, au point qu’il annonça, sinon la volontĂ©, au moins le dĂ©sir d’épouser la niĂšce du cardinal. La reine mĂšre fut indignĂ©e de voir jusqu’oĂč s’était Ă©levĂ©e l’ambition d’un ministre ingrat. Son imagination lui montra dans cette indigne alliance beaucoup de pĂ©rils vraisemblables et un opprobre certain. La fermetĂ© avec laquelle elle parla au cardinal fit rĂ©flĂ©chir ce vieux courtisan. Il prit le parti de se donner auprĂšs d’un monarque judicieux et reconnaissant le mĂ©rite d’avoir gĂ©nĂ©reusement combattu sa passion. Ses remontrances obtinrent un succĂšs plus prompt et plus facile qu’il ne l’avait espĂ©rĂ© peut-ĂȘtre. Il ordonna lui-mĂȘme l’exil de sa niĂšce. Marie Mancini eut la permission de voir encore une fois le roi dont elle se croyait tendrement aimĂ©e elle lui laissa pour adieux ces mots touchants Vous ĂȘtes roi, vous pleurez, et cependant je pars. » La paix des PyrĂ©nĂ©es se conclut peu de temps aprĂšs le dĂ©nouement de cette lĂ©gĂšre intrigue 1659. La France fut loin d’obtenir dans ce traitĂ© les avantages qui semblaient devoir ĂȘtre le rĂ©sultat de tant de victoires Ă©clatantes elle garda le Roussillon et l’Artois, mais rendit ses conquĂȘtes dans la Flandre. La clause la plus importante avait Ă©tĂ© le mariage du roi avec l’infante, fille de Philippe IV. Le cardinal Mazarin, dont on loua beaucoup depuis la haute prĂ©voyance, avait regardĂ© comme le chef-d’Ɠuvre de la politique de transporter Ă  la couronne de France des droits Ă©ventuels, soit sur la couronne d’Espagne, soit sur quelque partie de ses vastes Etats. Ces droits existaient dĂ©jĂ  par le mariage d’Anne d’Autriche avec Louis XIII. A la vĂ©ritĂ©, on exigeait une renonciation formelle de la part de l’infante et du roi ; mais la politique europĂ©enne, et surtout celle du cardinal, regardait ces renonciations comme la plus vaine des formalitĂ©s diplomatiques. Un grand appareil avait eu lieu dans les confĂ©rences qui se tinrent pour cet objet Ă  l’üle des Faisans entre le cardinal et don Louis de Haro, qui gouvernait la monarchie espagnole. De plus grandes magnificences signalĂšrent la cĂ©lĂ©bration du mariage. Louis, qui Ă©tait allĂ© chercher son Ă©pouse sur la frontiĂšre des PyrĂ©nĂ©es, la conduisit avec le plus beau cortĂšge. Pendant une grande partie de la route, on le vit suivre ou prĂ©cĂ©der la voiture de la nouvelle reine de France, Ă  cheval, le chapeau bas. Ce fut ainsi qu’il lui fit faire son entrĂ©e Ă  Paris. Tout dans cette fĂȘte brillait de grĂące, de fraĂźcheur ; tout eĂ»t brillĂ© d’espĂ©rance et de joie, si le cardinal Mazarin n’avait attristĂ© les regards par la pompe insolente qu’il s’avisa de dĂ©ployer. EntourĂ© de ses gardes et d’une compagnie de mousquetaires, il semblait au bout de six ans, triompher encore de la Fronde et montrer aux Français les dĂ©pouilles que, depuis cette Ă©poque, il avait levĂ©es sur le royaume. Le moment du rĂ©veil de Louis n’était point encore arrivĂ©. Enfin, au commencement de l’annĂ©e 1661, il vit dĂ©pĂ©rir ce ministre et montra une douleur exempte d’affectation. Le 9 mars 1661, jour de la mort du cardinal, les ministres s’approchĂšrent du roi et lui dirent avec assez de lĂ©gĂšretĂ© A qui nous adresserons-nous ? - A moi », reprit Louis XIV. Ce mot fut une rĂ©volution la cour et le peuple Ă©galement lassĂ©s du rĂšgne des favoris, regardĂšrent comme une sorte de libertĂ© de ne plus recevoir des ordres que du monarque, et de n’ĂȘtre plus avilis par leur obĂ©issance. Cependant on se dĂ©fiait encore des rĂ©solutions d’un jeune roi assailli de flatteurs, et fort susceptible des sĂ©ductions de l’amour et de la voluptĂ© ; mais on le vit bientĂŽt prendre des heures rĂ©glĂ©es et invariables pour le travail, lire toute requĂȘte avec une attention vraie, s’exprimer avec prĂ©cision, Ă©nergie, dĂ©mĂȘler les affaires les plus difficiles, soumettre Ă  l’ascendant de son caractĂšre, encore plus qu’à son autoritĂ© absolue, des hommes Ă©clatants de gloire, de talent et de gĂ©nie ; vaincre toute pensĂ©e de rĂ©bellion, jusque dans le cƓur des anciens hĂ©ros de la Fronde et de ce grand CondĂ© que la paix des PyrĂ©nĂ©es lui avait rendu on le vit noble et mesurĂ© dans ses paroles, absolu dans ses ordres, sans rudesse et sans colĂšre, obligeant dans son langage, fidĂšle Ă  ses affections, Ă  ses promesses ; plus heureux dans ses choix et ce bonheur dura quarante annĂ©es que ne le fut jamais aucun prince souverain, aucun sĂ©nat ; exempt de superstition dans son zĂšle religieux, mais toujours rendant Ă  la religion et Ă  ses ministres l’hommage d’un chrĂ©tien soumis et d’un roi ; se jouant de toutes les fatigues, et les cherchant Ă  plaisir, pour signaler l’ardeur de son Ăąge et la force de son tempĂ©rament. Amoureux des fĂȘtes, sans en ĂȘtre Ă©bloui ; plein de grĂące dans tous les exercices, mais d’une grĂące toujours royale, toujours auguste ; Ă©minemment douĂ© du talent d’unir les plus petits dĂ©tails aux plus grandes vues de la politique ; sensible aux plus heureuses productions des belles-lettres et des beaux-arts, et les apprĂ©ciant par des inspirations soudaines que dirons-nous enfin ? Toujours roi, sans distraction, sans contrainte, sans fatigue ; tellement roi, que tout son caractĂšre Ă©tait entrĂ© dans son rĂŽle. Jeune et plein d’ambition, il maintint pendant six ans la paix qu’il trouva Ă©tablie par le traitĂ© des PyrĂ©nĂ©es ; et la vigueur de son administration prĂ©para les succĂšs militaires qu’il devait obtenir. On peut juger combien il les dĂ©sirait par la maniĂšre dont il fit respecter l’honneur de sa couronne. Vers la fin de l’annĂ©e 1661, le baron de Watteville, ambassadeur d’Espagne Ă  la cour de Londres, disputa le pas au comte d’Estrade, ambassadeur de France, dans une cĂ©rĂ©monie qui avait pour objet l’entrĂ©e d’un ambassadeur de SuĂšde. Ces deux ministres rivaux s’étaient prĂ©parĂ©s Ă  cette lutte. D’Estrade avait rĂ©uni Ă  son cortĂšge cinq cents Français armĂ©s ; Watteville avait gagnĂ© la populace de Londres le comte d’Estrade fut insultĂ©, son cortĂšge mis en fuite ; quelques Français furent blessĂ©s. L’Espagnol poursuivit sa marche, et jouit insolemment de celte lĂąche victoire. Louis XIV fit Ă  l’instant sortir de ses États l’ambassadeur d’Espagne, rappela le sien, fit des prĂ©paratifs de guerre. L’Espagne, intimidĂ©e, se prĂȘta aux satisfactions exigĂ©es par la France ; et le petit-fils de Philipe II cĂ©da le pas au petit-fils de Henri IV. L’annĂ©e suivante, Louis eut une autre occasion de venger l’honneur de sa couronne. Le duc de CrĂ©qui, ambassadeur Ă  la cour de Rome, avait tolĂ©rĂ© la licence de ses gens, qui insultĂšrent et meurtrirent une compagnie corse de la garde du pape. La rĂ©paration d’un tel attentat n’eĂ»t pu ĂȘtre ni Ă©ludĂ©e ni diffĂ©rĂ©e par la cour de France ; mais le cardinal Chigi, frĂšre du pontife rĂ©gnant, voulut ou souffrit que les Corses se vengeassent par eux-mĂȘmes. Ceux-ci se rĂ©unirent pour assaillir l’ambassadeur dans son hĂŽtel ; ils tirĂšrent sur le carrosse de l’ambassadrice, tuĂšrent un page et blessĂšrent quelques domestiques. Le duc de CrĂ©qui se hĂąta de partir de Rome. Louis fit saisir le comtat d’Avignon, et Ă©crivit au pape que son armĂ©e Ă©tait prĂȘte Ă  passer les Alpes, pour marcher sur Rome, s’il n’obtenait une rĂ©paration Ă©clatante. Le pape, aprĂšs avoir vainement implorĂ© les secours des princes de la chrĂ©tientĂ©, fut obligĂ© de se soumettre Ă  d’humiliantes excuses, que le cardinal Chigi vint prĂ©senter lui-mĂȘme. Une pyramide Ă©levĂ©e dans Rome consacra le souvenir du plus sanglant affront qu’eut reçu le Vatican et que lui avait infligĂ© le fils aĂźnĂ© de l’Église. Le courage des Français ne manqua point d’occupation pendant la paix. Louis envoya noblement du secours Ă  l’empereur contre les Turcs, qui venaient de se rĂ©pandre dans la Hongrie, et pouvaient mettre Vienne en danger. Six mille Français remplis d’une ardeur chevaleresque partirent sous les ordres du comte de Coligny. Ils eurent la gloire d’opĂ©rer la dĂ©livrance de l’Allemagne, et obtinrent le principal honneur dans la victoire de Saint-Gothard. En mĂȘme temps, ce duc de Beaufort, qui, par sa popularitĂ© et sa valeur, bien plus que par ses talents, s’était rendu si dangereux Ă  l’autoritĂ© royale dans la guerre civile de la Fronde, portait, par les ordres du roi, du secours aux VĂ©nitiens, Ă©galement menacĂ©s par les Turcs ; et, montĂ© sur un petit nombre de galĂšres royales, il rĂ©primait les brigandages si longtemps impunis des Barbaresques. Louis s’était engagĂ©, par la paix des PyrĂ©nĂ©es, Ă  ne pas prĂȘter de secours Ă  la maison de Bragance, qui, par la rĂ©volution de 1640, avait arrachĂ© le Portugal Ă  la domination de l’Espagne, et qui, depuis ce temps, soutenait avec des succĂšs une guerre d’indĂ©pendance. Comme les Espagnols n’avaient pas rempli scrupuleusement les conditions de ce traitĂ©, Louis n’eut aucun scrupule de l’éluder, et de faire Ă©prouver Ă  l’Espagne quelques reprĂ©sailles de la part odieuse qu’elle avait prise aux guerres civiles de la Ligue et de la Fronde. Au moment oĂč les grands coups allaient se porter sur les frontiĂšres du Portugal, le comte de Schomberg, ami et Ă©lĂšve de Turenne, s’embarqua pour Lisbonne, avec quatre mille Français qui passaient pour ĂȘtre uniquement Ă  sa solde ; et nommĂ© gĂ©nĂ©ral de l’armĂ©e portugaise, il gagna la bataille de Villaviciosia, qui affranchit pour jamais le Portugal du joug de ses voisins. Mazarin avait tellement fait de l’intĂ©rĂȘt de l’Etat la seule religion des traitĂ©s, qu’il avait achetĂ© l’alliance du rĂ©gicide Cromwell, par la cession de Dunkerque. Il semblait que Louis XIV lui-mĂȘme eĂ»t oubliĂ© le crime du Protecteur en faveur de l’autoritĂ© absolue que celui-ci exerçait sur un peuple rĂ©voltĂ©. Quand le repentir des Anglais, ou les dĂ©goĂ»ts qu’ils montrĂšrent pour la domination peu ferme du fils de Cromwell, et ensuite pour la domination renaissante mais fort affaiblie du long parlement, eurent appelĂ© Charles II sur un trĂŽne ensanglantĂ©, Louis mit tous ses soins Ă  discerner le caractĂšre de ce monarque, sut profiter de ses embarras et de son naturel prodigue. Dans une nĂ©gociation qu’il suivit avec autant d’activitĂ© que de mystĂšre, il parvint Ă  racheter la ville de Dunkerque pour une somme de quatre millions. Les Anglais s’indignĂšrent lorsqu’ils eurent connaissance du marchĂ© honteux souscrit par leur roi. En vain le parlement fit offrir Ă  Charles II une somme Ă©quivalente Ă  celle qu’il allait recevoir du roi de France. Le traitĂ© reçut son exĂ©cution, parce que Charles II essayait tous les moyens de dĂ©pendre moins de son parlement. La guerre s’alluma bientĂŽt entre l’Angleterre et la Hollande. Louis, qui se livrait avec ardeur au projet de rendre enfin la France puissance maritime, vit avec intĂ©rĂȘt le dommage qu’allaient se causer ces deux marines rivales. Son pavillon ne put d’abord se distinguer ni presque se faire apercevoir dans ce conflit entre deux puissances qui couvraient les mers de trois cents vaisseaux ; mais, en secourant les Hollandais contre un voisin inquiet, l’évĂȘque de Munster, il parut montrer Ă  ces rĂ©publicains une amitiĂ© qui Ă©tait loin de son cƓur et qu’il devait bientĂŽt cruellement dĂ©mentir. Vers le mĂȘme temps, il achetait de l’imprudent Charles IV, duc de Lorraine, Marsal, la meilleure des forteresses de cette province il s’était mĂȘme flattĂ© d’avoir rĂ©uni la Lorraine Ă  la couronne de France, par un testament qu’il dicta et qu’il paya Ă  ce prince aventurier. L’agrandissement auquel visait Louis XIV pouvait se voiler par l’intĂ©rĂȘt commun que prenait encore l’Europe Ă  l’apaisement de la maison d’Autriche. La plupart de ces petites entreprises offraient quelque chose de chevaleresque, puisque leur but Ă©tait de porter du secours aux faibles. Louis occupait ainsi au dehors une noblesse inquiĂšte et cette foule d’aventuriers mercenaires qu’avait dĂ» multiplier soit la guerre civile, soit la mauvaise administration intĂ©rieure du cardinal Mazarin. Mais il voulait des conquĂȘtes. La mort de Philippe IV, son beau-pĂšre, lui en fournit l’occasion et le prĂ©texte. Puissant, ambitieux, muni d’un bon trĂ©sor, soutenu par une armĂ©e longtemps victorieuse que commandaient encore Turenne et CondĂ©, il ne fut point arrĂȘtĂ© par le scrupule de respecter les droits de Charles II, faible enfant qui montait sur le trĂŽne d’Espagne. En Ă©change d’une dot de 500 000 francs promise Ă  la reine son Ă©pouse, que la cour d’Espagne avait nĂ©gligĂ© de payer, et que celle de France s’était bien gardĂ©e de rĂ©clamer, il demanda la Flandre et la Franche-ComtĂ©. AprĂšs quelques dĂ©lais, commandĂ©s par la nĂ©cessitĂ© de former d’amples magasins, il marcha sur la Flandre, emmenant avec lui Turenne, Louvois et Vauban, la meilleure infanterie, les plus habiles ingĂ©nieurs et la plus redoutable artillerie de l’Europe. Point de place renommĂ©e qui ne tombĂąt devant lui. Lille elle-mĂȘme ne lui demanda que neuf jours de siĂšge. Il lui suffit de se prĂ©senter devant Douai, ArmentiĂšres, Charleroi, Tournai, Courtrai et vingt autres places. L’armĂ©e espagnole n’osait porter du secours Ă  aucune de ces forteresses. La conquĂȘte de la Franche-ComtĂ© fut encore plus facile les villes ouvraient leurs portes au grand CondĂ© presque Ă  la premiĂšre sommation ; la soumission de plusieurs commandants et de plusieurs magistrats avait Ă©tĂ© payĂ©e par l’or de la France. Quelque diligence que fĂźt Louis pour trouver encore quelque occasion de gloire dans cette province, il n’arriva que pour presser le siĂšge de DĂŽle, qui seule osa se dĂ©fendre pendant quatre jours. L’Autriche allemande s’était tenue immobile pendant ces coups portĂ©s Ă  l’Autriche espagnole. On vit avec Ă©tonnement la Hollande venir au secours du petit-fils de Philippe II. Le grand pensionnaire de Witt craignit pour son pays un voisin plus dangereux que l’Espagne affaiblie il fallut nĂ©gocier. Louis, irritĂ© de cette intervention inattendue, mais cachant alors son ressentiment, prit le parti de rendre une de ces deux conquĂȘtes pour s’assurer l’autre. Il restitua la Franche-ComtĂ©, bien dĂ©terminĂ© Ă  la reprendre Ă  la premiĂšre occasion, et se fit cĂ©der, par le traitĂ© d’Aix-la-Chapelle 1668, plusieurs de ces villes florissantes qui forment aujourd’hui la Flandre française. Il est temps de le suivre dans des travaux d’une gloire plus pure et d’un ordre encore plus imposant. Un sens exquis lui avait suggĂ©rĂ© comme le premier de ses devoirs celui de travailler Ă  la rĂ©forme de l’administration, et les succĂšs qu’il avait obtenus se manifestent par les nĂ©gociations diverses oĂč nous venons de le voir, l’or Ă  la main, dicter ses lois Ă  des gouvernements obĂ©rĂ©s. Soit que le cardinal Mazarin rougĂźt de son immense fortune de quarante millions, soit qu’il tentĂąt sur le cƓur du roi une Ă©preuve dont il se tenait assurĂ©, il lui en fit une entiĂšre donation, que Louis refusa dans son aveugle gratitude ; et un trĂ©sor bien supĂ©rieur Ă  celui qu’avait laissĂ© Charles V et comparable Ă  celui de Henri IV alla s’engloutir en peu d’annĂ©es dans les folles et vaniteuses dĂ©penses du fantasque Ă©poux de l’une des niĂšces du cardinal. Mais tout trĂ©sor qu’on se fait par l’économie vaut mieux que celui qu’on a reçu en hĂ©ritage. Louis le prouva par son exemple ; il montra une ardeur sans Ă©gale pour s’initier dans les secrets de l’administration. Il y avait, sous Mazarin, comme deux ministres des finances l’un qui prĂ©sidait aux siennes, c’était Colbert, son intendant ; l’autre, Ă  celles de l’État, c’était Fouquet. Les premiĂšres Ă©tant aussi florissantes que les secondes Ă©taient dĂ©sordonnĂ©es, Mazarin vantait Colbert au roi, et lui faisait peut-ĂȘtre soupçonner Fouquet, afin de n’ĂȘtre pas soupçonnĂ© lui-mĂȘme. A la mort du cardinal, Fouquet crut pouvoir continuer des dĂ©sordres que son faste rendait manifestes. Cependant Louis observait son surintendant. IrritĂ© d’avoir vu que cet opulent sĂ©ducteur des plus belles personnes de la cour avait osĂ© porter ses vues jusque sur mademoiselle de la ValliĂšre, il se sentit animĂ© contre lui d’une haine que Colbert enflamma. Louis regarda comme un tĂ©moignage des dĂ©prĂ©dations du surintendant l’étalage indiscret de son opulence. AprĂšs l’avoir fait arrĂȘter par le capitaine de ses gardes, et transfĂ©rer de prison en prison, il le poursuivit par des abus de pouvoir qui rappelaient le temps de Richelieu, le fit juger par une commission, non seulement pour les dĂ©prĂ©dations qu’il avait pu commettre, mais pour le dĂ©lit chimĂ©rique d’une tentative de rĂ©bellion. Il montra dans cette circonstance, et devait montrer dans des circonstances plus grandes, combien la force d’une prĂ©vention reçue pouvait altĂ©rer la justesse de son esprit et l’équitĂ© de son caractĂšre. On le vit avec surprise, peu de jours aprĂšs la disgrĂące de Fouquet, s’imposer Ă  lui-mĂȘme tout le travail d’un surintendant des finances. Il est vrai qu’il s’associa, pour cet emploi, Colbert, qu’il nomma contrĂŽleur gĂ©nĂ©ral ; mais s’il reçut de lui une instruction difficile, tout prouve qu’il Ă©tendit, par des conceptions hautes et judicieuses, l’esprit exact, habile et vigilant de l’intendant de Mazarin. Colbert, sous un prince indolent et dissipĂ©, eĂ»t pu n’ĂȘtre qu’un homme Ă  ressources ; inspirĂ© par le grand cƓur de Louis XIV, il fut un homme de gĂ©nie. L’imagination s’étonne des travaux qu’ils accomplirent en quelques annĂ©es de paix, et mĂȘme au milieu de plusieurs guerres qu’il fallut soutenir contre la plupart des États de l’Europe. On vit l’impĂŽt des tailles rĂ©duit successivement d’un cinquiĂšme, l’intĂ©rĂȘt de la dette publique diminuĂ© de prĂšs de vingt millions, le revenu de l’État considĂ©rablement augmentĂ© par la prospĂ©ritĂ© du commerce ouvrage commun du roi et de son ministre. L’Europe vit avec Ă©tonnement l’industrie française, dĂšs son premier essor, surpasser celle des Pays-Bas, des villes commerçantes d’Italie, et des villes hansĂ©atiques. De nobles avances faites par Louis sollicitĂšrent d’abord l’activitĂ© des particuliers. Le luxe justifia toutes ces inventions en leur donnant un caractĂšre de grandeur et de soliditĂ©. Les manufactures de draps d’Abbeville, de Sedan, de Louviers et d’Elbeuf, celles des Ă©toffes de soie de Lyon et de Tours, furent dĂšs leur naissance sans rivales en Europe. Les secrets des manufactures de glaces et de plusieurs autres genres d’industrie furent enlevĂ©s aux VĂ©nitiens, aux Pisans, aux GĂ©nois. Les tapisseries des Gobelins se montrĂšrent dignes de retracer les faits d’un rĂšgne hĂ©roĂŻque, et les tapis de la Savonnerie surpassĂšrent la magnificence du luxe oriental. Une foule de jeunes paysannes furent habilement dirigĂ©es dans le travail des dentelles. Des manufactures de chapeaux, de bas, d’étoffes communes, de divers ustensiles de fer et de cuir, l’invention de beaux carrosses substituĂ©s Ă  des voitures grossiĂšres fournissaient encore plus aux riches exportations de la France. L’intĂ©rĂȘt de l’argent diminua les capitaux s’accrurent. On fut Ă©tonnĂ© du petit nombre de faillites parmi tant de nouveaux Ă©tablissements. On eĂ»t dit qu’il Ă©tait formĂ© un Colbert dans chaque manufacture. L’agriculture reçut des soulagements par la diminution des tailles ; mais Colbert commit la faute de la subordonner trop aux besoins des manufactures en dĂ©fendant presque toujours l’exportation des blĂ©s, qui avait produit tant de trĂ©sors sous l’administration de Henri IV et de Sully. L’esprit de rĂšglement donna une impulsion et des rĂšgles communes Ă  tant d’établissements qui naissaient Ă  la fois ; et tout ce qui Ă©mana de Colbert joignit la rigueur du bon sens Ă  une prĂ©voyance Ă©tendue. Bordeaux, Nantes, Saint-Malo et Dunkerque firent connaĂźtre et respecter les vaisseaux français dans les Indes et le nouveau monde. Le commerce de Marseille s’étendit dans les Ă©chelles du Levant. Colbert reçut, comme un juste prix de ses soins, un nouveau dĂ©partement, celui de la marine, et il fut pour elle un admirable lĂ©gislateur. BientĂŽt s’élevĂšrent les magnifiques constructions des ports de Toulon, de Brest et de Rochefort. Louis, en mĂȘme temps qu’il dĂ©livrait son peuple des concussions des traitants, s’occupait de mettre un frein aux vexations des gens de justice. En 1667 parut l’ordonnance sur la procĂ©dure civile dont la prĂ©cision et la clartĂ©, Ă©pouvantant le gĂ©nie de la chicane, l’embarrassĂšrent longtemps, mais sans pouvoir le vaincre. Les grands actes de la lĂ©gislation se multipliĂšrent. En peu de temps parurent un Code pour le commerce 1673, un autre pour la marine 1681, un autre pour les eaux et forets 1669, oĂč brille le gĂ©nie de la conservation ; un autre pour les colonies, connu sous le nom de Code noir, et oĂč perçaient quelques lueurs d’humanitĂ©. L’ordonnance pour l’instruction de la procĂ©dure criminelle 1670, est de tous ces codes celui qui a encouru les plus lĂ©gitimes censures. On sait qu’un homme dur, Pussort, oncle de Colbert, rĂ©ussit Ă  conserver les principes d’une jurisprudence gothique et cruelle que Lamoignon voulut sagement modifier. A l’exception de ce dernier code, tous les autres, opĂ©rant des amĂ©liorations faciles, devaient un jour inviter les esprits Ă  s’occuper d’amĂ©liorations plus importantes. Louis prenait beaucoup d’ombrage des innovations politiques ; et ce qu’il y eut d’étonnant, c’est que tous les Français partagĂšrent alors la mĂȘme dĂ©fiance. L’amour de l’ordre Ă©tait devenu la passion du siĂšcle ; mais on voulait un ordre plein de vigueur et de majestĂ©, fĂ©cond en rĂ©sultats, en crĂ©ations ; et l’on trouva le secret d’ĂȘtre original sans bizarrerie et sans tĂ©mĂ©ritĂ©. Il parut Ă  la fois une foule d’excellents magistrats, d’hommes signalĂ©s par des vertus antiques dans ces mĂȘmes parlements qui n’avaient pu Ă©viter le ridicule en conduisant une guerre civile. Louis se gardait bien de montrer aucun ressentiment et cachait sa dĂ©fiance sous des formes polies. Dans le progrĂšs de son autoritĂ© absolue, il en vint jusqu’à supprimer le droit de remontrance ou du moins jusqu’à le rendre illusoire, en ne le permettant plus que huit jours aprĂšs l’enregistrement des Ă©dits. Le clergĂ© surpassait alors en Ă©clat et en renommĂ©e l’honorable magistrature dont on a parlĂ©. De grands exemples de piĂ©tĂ© brillaient dans la capitale Saint-Vincent de Paul avait donnĂ© Ă  son siĂšcle la plus heureuse impulsion, et des Ă©tablissements de charitĂ© et de bienfaisance s’étaient Ă©levĂ©s de toutes parts Ă  sa voix. De nouveaux PĂšres de l’Église, dignes rivaux par leurs talents des plus fameux orateurs de l’antiquitĂ©, animaient le zĂšle religieux dans un siĂšcle poli. L’incrĂ©dulitĂ© naissante fut dĂ©concertĂ©e Ă  la vue de ces puissants athlĂštes de la foi, et se rĂ©fugia dans les plaisirs d’un indolent Ă©picurisme ou dans les futilitĂ©s du bel esprit. Les diffĂ©rentes sortes de la religion rĂ©formĂ©e trouvĂšrent de redoutables contradicteurs. Louis XIV, ennemi des innovations religieuses et les redoutant pour son autoritĂ© comme pour le repos de la France, montra de fortes prĂ©ventions contre le jansĂ©nisme, que la reine sa mĂšre avait dĂ©jĂ  en aversion. Cependant les hommes religieux, austĂšres, Ă©loquents, qu’on dĂ©signait sous le nom de solitaires de Port-Royal, ont contribuĂ© Ă  l’éclat de ce beau siĂšcle de l’Église qui fut en mĂȘme temps le beau siĂšcle des lettres. L’auteur des Lettres provinciales, enlevĂ© par une mort prĂ©maturĂ©e, avait laissĂ© la sublime esquisse du plus grand ouvrage qui eĂ»t Ă©tĂ© entrepris pour la dĂ©fense de la religion chrĂ©tienne. Le docteur Arnauld, trop ardent sur d’autres objets, dĂ©fendait avec succĂšs la religion catholique contre les attaques d’un puissant controversiste, Claude, ministre protestant. Les Bossuet, les FlĂ©chier, les FĂ©nelon, les Bourdaloue, faisaient des conversions auxquelles aidait parfois la sagesse de Louis XIV. Heureux ce monarque, s’il eĂ»t pris plus de confiance dans le zĂšle et le talent de ces redoutables adversaires de l’hĂ©rĂ©sie, et s’il n’eĂ»t voulu depuis avancer les Ɠuvres de la foi par la force de l’autoritĂ© ! Les dignitĂ©s ecclĂ©siastiques ne furent jamais confĂ©rĂ©es avec plus de scrupule. Aucun Ă©vĂȘque n’osa sortir de la sphĂšre de ses devoirs, et jamais l’épiscopat ne fut plus illustrĂ©. On ne vit point, comme dans les cinquante annĂ©es prĂ©cĂ©dentes, les prĂ©lats gouverner l’empire, commander les armĂ©es en personne ou marcher Ă  la tĂȘte des factions. Il n’y eut que le mĂ©tier de courtisan auquel tous les Ă©vĂȘques ne renoncĂšrent pas. Pendant la premiĂšre moitiĂ© de ce rĂšgne, ce clergĂ©, qui Ă©levait de nouveaux boulevards autour de la religion catholique, se montra plein de zĂšle Ă  dĂ©fendre les libertĂ©s de l’Église gallicane et Ă  repousser les prĂ©tentions ultramontaines. Louis XIV, dans sa fiertĂ© royale, donnait cette impulsion que Bossuet secondait par son Ă©loquence, par l’étendue et la puretĂ© de sa doctrine. La cour de Rome s’étonna et s’irrita d’une rĂ©sistance habile, respectueuse et ferme, qui produisit en 1682 les quatre fameuses propositions du clergĂ©, lesquelles ont Ă©tĂ© depuis dĂ©savouĂ©es par un clergĂ© devenu ultramontain. Car Louis maintint mal son ouvrage ; le clergĂ© changea de principes le parlement seul conserva les siens. La condition des nobles dĂ©chut sans qu’ils s’en aperçussent. Il n’y eut plus de ces grands seigneurs qui, soit Ă  la cour soit dans leur gouvernement, rappelaient les grands vassaux d’autrefois, levaient des armĂ©es et marchaient toujours entourĂ©s de trois ou quatre cents gentilshommes. Le titre de gouverneur perdit beaucoup de son autoritĂ© ; elle fut transfĂ©rĂ©e en partie Ă  des commandants moins dangereux par leur crĂ©dit et leur naissance. Ce que Louis XI et le cardinal de Richelieu avaient opĂ©rĂ© avec des Ă©chafauds, Louis XIV sut le consommer avec des pensions, des rubans, avec des regards bienveillants ou sĂ©vĂšres, avec des paroles flatteuses, presque toujours brillantes d’à-propos, de grĂące et de justesse, avec les Ă©tiquettes de son palais, avec le privilĂšge des grandes et des petites entrĂ©es, avec la compagnie qu’il nommait pour le suivre Ă  l’armĂ©e ou dans ses voyages de Marly, de CompiĂšgne, de Fontainebleau ; enfin avec tous ces signes commodes et variĂ©s qui annoncent la faveur, en excitent le dĂ©sir et font servir la jalousie des grands Ă  la sĂ©curitĂ© et au pouvoir du prince. Ce genre de prestige Ă©tait nouveau Louis XIII n’eĂ»t jamais pu le crĂ©er avec son caractĂšre sombre et sauvage. Henri IV, dans sa grandeur et sa bontĂ©, avait une maniĂšre plus vive et plus impĂ©tueuse de dĂ©clarer ses sentiments. Cet art Ă©tait tout fait pour le caractĂšre, l’esprit et la situation de Louis XIV. Il put s’amuser longtemps de ces petites inventions qui opĂ©raient de grands rĂ©sultats ; mais quand ce rĂ©gime fut Ă©tabli dans toute son uniformitĂ©, il n’en Ă©prouva plus que la contrainte et l’ennui. NĂ© en quelque sorte sur le trĂŽne, il n’eut pas comme son aĂŻeul le bonheur de connaĂźtre l’amitiĂ©, mais il se conduisait envers ses courtisans comme l’ami le plus judicieux. Arbitre de leurs discordes, il Ă©tait aussi le confident de leurs peines domestiques. Souvent il sut prĂ©venir de grands dĂ©sordres, Ă©touffer d’horribles scandales. La cour ne se ressentait que trop des souillures des mƓurs italiennes contractĂ©es sous la rĂ©gence des deux MĂ©dicis. Louis lui rendit des mƓurs françaises, c’est-Ă -dire des mƓurs plus aimables que rĂ©guliĂšres. De jeunes courtisans qui avaient bravĂ© les lois et le mĂ©pris public, juste et faible chĂątiment de leurs excĂšs, furent enfin contenus par les sĂ©vĂšres remontrances du prince et par la crainte d’une disgrĂące Ă©ternelle. L’adultĂšre, trop encouragĂ© par les exemples du monarque, fut souvent expiĂ© par des repentirs profonds ; et le cloĂźtre ne cessa de s’ouvrir Ă  d’illustres pĂ©cheresses. Toutes les passions, assujetties Ă  des biensĂ©ances qui n’étaient point encore de l’hypocrisie, eurent plus de profondeur et plus de dĂ©licatesse. Partout le langage devint plus noble parce que les sentiments l’étaient davantage, et fut en mĂȘme temps naturel parce que les grandes choses et les grandes idĂ©es devenaient plus familiĂšres. La vertu sans tache obtenait des honneurs constants dans une cour galante. Quel sort plus heureux l’imagination peut-elle souhaiter Ă  des femmes brillantes d’esprit, d’agrĂ©ment et distinguĂ©es davantage encore par les qualitĂ©s du cƓur, que le sort de mesdames de SĂ©vignĂ©, de la Fayette, du Grignan, de Villars, et que celui mĂȘme de madame de Maintenon, si elle ne fĂ»t devenue reine ? Nul hĂ©ros des temps anciens ne surpasse Turenne en modestie, en dĂ©sintĂ©ressement, en dĂ©licatesse. Le duc de Montausier, gouverneur du Dauphin, ne fut point un inutile censeur des mƓurs de son temps il fut Ă©galĂ© dans ses vertus par les ducs de Chevreuse et de Beauvilliers, les amis de FĂ©nelon. La sĂ©vĂ©ritĂ© des ordonnances de Louis contre les duels ne put abolir, mais diminua beaucoup cet usage barbare. Pour qu’on ne nous reproche pas de laisser rien d’idĂ©al dans un tel tableau, nous avouerons que ceux des courtisans qui persĂ©vĂ©raient dans des mƓurs dissolues se livraient Ă  plusieurs genres d’excĂšs ou de turpitude devenus bien plus rares dans le XVIIIe siĂšcle mĂȘme chez des hommes corrompus, tels que les friponneries au jeu, divers genres d’escroqueries, les sociĂ©tĂ©s de prĂ©tendus devins et les plus grossiers excĂšs de la table. Nous avouerons encore qu’il y eut des empoisonnements prĂ©sumĂ©s, d’autres constatĂ©s ; mais quelques exemples d’immoralitĂ© et de scĂ©lĂ©ratesse n’ont jamais rien prouvĂ© contre l’esprit gĂ©nĂ©ral d’une nation, d’une sociĂ©tĂ©, d’une cour. Louis XIV ne sĂ©para jamais son estime de sa faveur. Le marĂ©chal de Vivonne s’en montra digne par de brillants succĂšs sur terre et sur mer, par sa probitĂ© dĂ©licate et par son goĂ»t pour les lettres. Le duc de la Feuillade avait dĂ©ployĂ© des qualitĂ©s chevaleresques dans la brillante expĂ©dition des Français envoyĂ©s au secours de l’empereur contre les Turcs. Il fit Ă©riger Ă  ses frais le monument trop fastueux de la place des Victoires ce fut un tort Ă  Louis de le souffrir ; mais on ne voit pas que la vanitĂ© de ce monarque ait reconnu un si brillant et si dangereux hommage par d’immenses largesses. Lauzun avait sĂ©duit le roi par l’ingĂ©nieuse vivacitĂ© et l’air passionnĂ© qu’il portait dans son rĂŽle de courtisan ; mais il dut vivement l’irriter par son arrogance, par des incartades irrespectueuses et par le trop heureux succĂšs de ses artifices auprĂšs de Mademoiselle, fille de Gaston d’OrlĂ©ans. On sait qu’un jour oĂč il avait poussĂ© le roi Ă  bout par une indiscrĂ©tion impardonnable, Louis jeta sa canne par les fenĂȘtres en disant Dieu me prĂ©serve du malheur de frapper un gentilhomme ! » Il Ă©tait beau d’exprimer et de rĂ©primer ainsi sa colĂšre ; mais Louis usa moins modĂ©rĂ©ment de son autoritĂ© despotique en faisant enfermer pendant dix ans Ă  Pignerol ce mĂȘme duc de Lauzun devenu, par un mariage secret, l’époux de Mademoiselle. Par une bizarrerie qui dĂ©note les vices de son caractĂšre, le duc se conduisit au sortir de cette prison comme le tyran de la princesse qu’il avait subjuguĂ©e et comme l’adorateur le plus passionnĂ© du roi, qui lui avait tĂ©moignĂ© un si long et si cruel ressentiment. Le duc de la Rochefoucauld, fils de l’auteur des Maximes, fut le plus discret de tous les favoris. La faveur du marĂ©chal de Villeroi devint, beaucoup plus tard, fatale aux armes françaises c’était cependant un guerrier plein d’honneur et de vaillance, mais d’un talent mĂ©diocre et d’un caractĂšre faible, qu’il tĂąchait de rehausser par des dehors glorieux. Louis XIV fut encore moins dominĂ© par ses maĂźtresses que par ses favoris. Ce monarque n’affranchit point sa famille des lois de l’étiquette qu’il imposait Ă  tous ses courtisans il rendit cependant tous les soins d’un fils tendre et respectueux Ă  la reine Anne d’Autriche, qui mourut en 1666 aprĂšs une maladie longue et douloureuse. Il parut prendre un soin continuel d’intimider, mais sans rudesse et sans emportement, son frĂšre, Monsieur, qui, livrĂ© comme Gaston d’OrlĂ©ans, Ă  des favoris tracassiers et pervers, eĂ»t pu, Ă©tant moins surveillĂ©, renouveler les troubles du rĂšgne de Louis XIII. L’épouse de ce prince, immortalisĂ©e par l’éloquence et les regrets pathĂ©tiques de Bossuet, avait paru inspirer au roi, son beau-pĂšre, des sentiments que le public et la cour mĂȘme n’auraient vus qu’avec horreur. Louis eut la force de faire taire une passion naissante. La mort subite et prĂ©maturĂ©e de cette princesse aimable frappa les esprits du soupçon d’un grand crime le roi, dans sa douleur, sut s’abstenir de commencer des recherches odieuses, et de sacrifier la sĂ»retĂ© de l’État et la paix de sa famille Ă  des bruits populaires. Plusieurs lettres de Louis indiquent qu’il aimait tendrement le Dauphin ; mais peut-ĂȘtre fit-il trop souvent sentir Ă  son fils la froide autoritĂ© du monarque. Ce prince, timide et inappliquĂ©, rĂ©pondait faiblement aux espĂ©rances qu’avaient fait concevoir deux instituteurs tels que le duc de Montausier et Bossuet. L’épouse de Louis XIV, modeste, rĂ©servĂ©e, constante et douce dans sa piĂ©tĂ©, semblait se faire une crainte Ă©gale de dĂ©plaire Ă  Dieu ou de dĂ©plaire Ă  son Ă©poux. Louis, en l’environnant de respects et de quelques tĂ©moignages d’affection, n’exerça que trop la patience de la pieuse reine par l’éclat et la multiplicitĂ© de ses amours adultĂšres. D’abord il parut se les reprocher, en rougir, et ne cĂ©der qu’à le force de la passion ; mais dĂšs qu’il se crut assez grand pour se faire pardonner un genre de fautes que la nation française a toujours trop faiblement reprochĂ© Ă  ses rois, il dĂ©clara sans contrainte et avec une sorte de faste les liaisons les plus coupables. Accessible aux remords avant d’avoir atteint l’ñge qui Ă©mousse les dĂ©sirs, il parut, dĂšs sa quarante-deuxiĂšme annĂ©e, prĂ©fĂ©rer des sentiments Ă©purĂ©s Ă  des plaisirs enivrants qui troublaient sa conscience. La ValliĂšre, dans le secret d’une passion qu’elle s’efforça vainement de combattre et se reprocha sans cesse, craignait des honneurs indices de sa faiblesse ; elle les reçut en rougissant, adora toutes les volontĂ©s de Louis, lui sacrifia deux fois un repentir ou de justes alarmes qui la portaient Ă  la retraite, trembla toujours de l’affliger, et, aprĂšs l’avoir vu inconstant, attendit avec la crĂ©dulitĂ© des Ăąmes tendres que sa patience et la sincĂ©ritĂ© de son amour lui ramenassent un roi dont les passions voulaient ĂȘtre irritĂ©es par les obstacles. Ses longues douleurs furent respectĂ©es par les courtisans. On sentait que le cƓur du monarque ne pouvait subir un plus aimable et plus doux esclavage. BientĂŽt elle se crĂ©a des droits Ă  l’estime et Ă  la vĂ©nĂ©ration des personnes les plus austĂšres, Il n’y en eut aucune qui ne la suivĂźt de ses pleurs au couvent des CarmĂ©lites, dans le moment solennel oĂč, sous les yeux de la reine, elle consomma un religieux sacrifice auquel l’éloquence de Bossuet prĂȘtait encore plus d’intĂ©rĂȘt et de pompe. Madame de Montespan, douĂ©e d’une beautĂ© Ă©blouissante, armĂ©e d’un esprit vif et piquant, rĂ©gna par des artifices et des dĂ©fauts qui eussent peut-ĂȘtre prolongĂ© l’empire de sa rivale. D’abord, elle s’inquiĂ©ta, ou parut s’inquiĂ©ter des premiers hommages du roi, et engagea son mari de l’emmener loin de la cour celui-ci ne crut pas alors devoir faire le sacrifice de son ambition personnelle Ă  des craintes qui pouvaient ĂȘtre chimĂ©riques ; mais son Ă©pouse lui fit cruellement expier son incrĂ©dulitĂ©. Elle plaça bientĂŽt son orgueil dans un scandale Ă©clatant, rechercha les indignes honneurs d’une maĂźtresse dĂ©clarĂ©e, et livra un mari qui l’obsĂ©dait de ses plaintes, quelquefois de ses fureurs, Ă  la colĂšre du roi. Louis, en sacrifiant mademoiselle de la ValliĂšre Ă  cette maĂźtresse arrogante, perdit ce bonheur si rarement goĂ»tĂ© des rois, celui d’ĂȘtre aimĂ© pour lui-mĂȘme mais s’il soumit Ă  madame de Montespan une cour qu’il avait pliĂ©e Ă  toutes les formes de l’idolĂątrie, il se garda bien de lui soumettre aucune opĂ©ration de son cabinet. L’esprit de madame de Montespan Ă©tait d’ailleurs peu fait pour de tels soins, et ne se manifestait que par des saillies malignes et mordantes. Louis y souriait gravement, et quoique dominĂ© par ses sens, quoique rĂ©veillĂ© dans sa passion par des orages perpĂ©tuels et toutes les contrariĂ©tĂ©s d’un caractĂšre hautain et capricieux, il sentait le besoin d’entretiens plus solides, plus calmes, d’un commerce plus doux et plus mĂȘlĂ© de confiance. Ces entretiens, il les trouva bientĂŽt auprĂšs de la veuve de Scarron, Ă  qui son indigence avait fait accepter l’emploi de gouvernante des enfants que le roi avait eus de madame de Montespan. D’abord, il avait craint en elle, et fort mal Ă  propos, cette espĂšce de gĂȘne que fait souvent Ă©prouver le bel esprit ; mais chaque jour il sentit mieux l’aimable ascendant d’un esprit naturel, mĂȘlĂ© de mille agrĂ©ments que rehaussaient toujours le bon sens, la vertu, la piĂ©tĂ© modeste. Madame Scarron, qu’il faut dĂšs Ă  prĂ©sent nommer madame de Maintenon, Ă©tait belle encore ; mais elle se garda bien de compter sur ses attraits pour balancer ou pour ruiner l’empire de madame de Montespan. Ce fut en ne prĂ©tendant qu’à l’amitiĂ© du roi qu’elle fit, par degrĂ©s, naĂźtre un amour profond. Cette amie cependant Ă©tait sĂ©vĂšre elle rĂ©veillait ou nourrissait dans le cƓur de Louis XIV des scrupules auxquels il se proposait de satisfaire plus tard. Il venait tous les soirs rĂȘver auprĂšs de madame de Maintenon Ă  sa conversion future, qu’il diffĂ©rait beaucoup. Bossuet secondait avec un zĂšle un peu timide les pieux avis de madame de Maintenon. L’un et l’autre crurent souvent avoir vaincu la faiblesse du roi, mais ne firent que procurer Ă  madame de Montespan la joie et le triomphe d’une rĂ©conciliation passionnĂ©e. Cependant Louis lui donna pour rivale mademoiselle de Fontanges, regardĂ©e Ă  la cour comme un prodige de beautĂ©, mais de beautĂ© seulement. Le rĂšgne si court de cette favorite ne servit qu’à Ă©teindre l’amour du monarque pour madame de Montespan, et lui fit sentir encore mieux le charme plus puissant et plus durable des entretiens de madame de Maintenon. Lorsque celle-ci rĂ©gna seule sur le cƓur du roi, elle n’obtint, et ne rechercha peut-ĂȘtre qu’une influence trĂšs restreinte sur les rĂ©solutions politiques. Il faut maintenant parler de la direction que Louis XIV donna aux sciences, aux lettres, aux beaux-arts. Descartes n’était plus mais ce philosophe rĂ©gnait, aprĂšs sa mort, par la clartĂ© et la nouveautĂ© hardie de sa mĂ©thode, la noblesse sĂ©vĂšre de son style, l’étendue de ses dĂ©couvertes, l’ensemble et l’audace de ses hypothĂšses. Le premier des modernes, il avait remplacĂ© Aristote dans une sorte de monarchie universelle sur le monde savant, surtout le monde penseur. C’était principalement par ses mĂ©ditations mĂ©taphysiques qu’il semblait avoir soufflĂ© aux esprits quelque chose de divin que l’on reconnaĂźt dans l’éloquence de Bossuet, dans les hautes pensĂ©es de Pascal, dans la doctrine d’Arnauld, dans celle de Bourdaloue, dans la philosophie aussi Ă©levĂ©e que tendre de FĂ©nelon, dans la philosophie fiĂšre et mesurĂ©e de la BruyĂšre, dans cette philosophie si profonde, que Malebranche, le continuateur de Descartes, exprima d’un style si limpide. Si ce grand siĂšcle littĂ©raire fut appelĂ© le siĂšcle de Louis XIV, c’est qu’il y eut une Ă©poque brillante oĂč tout parut entrer dans la sphĂšre de ce monarque. Notre imagination nous dit que Bossuet eĂ»t Ă©tĂ© moins sublime en foudroyant les grandeurs humaines, s’il ne les avait vues Ă©talĂ©es dans la plus grande pompe quelles eussent jamais reçue ; que Racine, loin d’une telle cour, ne fĂ»t point parvenu Ă  peindre avec un charme si puissant, ni Quinault avec une grĂące si sĂ©duisante, les faiblesses du cƓur ; que Massillon ne les eĂ»t pas pĂ©nĂ©trĂ©es avec tant de profondeur, combattues avec tant d’onction ; que les fables de la Fontaine devaient s’écrire en mĂȘme temps que les lettres de madame de SĂ©vignĂ© ; que le gĂ©nie observateur de MoliĂšre dut ĂȘtre singuliĂšrement secondĂ© par le passage de mƓurs encore incultes Ă  des mƓurs si polies. Il n’est point d’homme d’un goĂ»t exercĂ© qui ne sente que le canal qui joint les deux mers, la colonnade du Louvre, l’arc de triomphe de Saint-Denis, le dĂŽme des Invalides, les beaux ouvrages sortis du ciseau de Girardon et de Puget, les tableaux de Lebrun et de Lesueur, les jardins de LenĂŽtre ; que tous ces monuments resplendissants de majestĂ© devaient ĂȘtre contemporains des tragĂ©dies de Corneille et de Racine, des oraisons funĂšbres de Bossuet. Les vertus de Turenne Ă©levaient l’esprit de FlĂ©chier. L’admiration pour Louis XIV fut un sentiment commun Ă  tous ces hommes de gĂ©nie. Presque tous furent rĂ©compensĂ©s par lui avec discernement, avec grĂące, et quelques-uns avec magnificence. Ils s’entraidaient ; s’échauffaient par la simultanĂ©itĂ© des merveilles qu’ils avaient Ă  s’offrir, et semblaient, dans des genres si divers, puiser Ă  une mĂȘme source du beau. Le grand CondĂ©, le duc de la Rochefoucauld, le marĂ©chal de Vivonne, le prĂ©sident de Lamoignon, le duc de Montausier, partagĂšrent sans doute avec Louis le mĂ©rite d’avoir Ă©tĂ© les bienfaiteurs des lettres. Mais n’a-t-il pas dĂ» obtenir le premier rang, ce monarque qui protĂ©gea la reprĂ©sentation du Tartuffe contre les ressentiments des faux dĂ©vots et les scrupules de beaucoup d’ñmes timorĂ©es ; qui permit Ă  MoliĂšre de soumettre la cour elle-mĂȘme Ă  ses tableaux ; qui rendit le sort de Racine et de Boileau plus doux encore que n’avait Ă©tĂ© celui de Virgile et d’Horace ; qui, dans sa jeunesse, reçut si bien un avertissement sĂ©vĂšre que lui donna l’auteur de Britannicus ; qui trouva bon que Boileau cassĂąt ses arrĂȘts en matiĂšre de goĂ»t ; enfin qui fut remerciĂ© avec tant de feu par Corneille vieillissant d’avoir ranimĂ© l’enthousiasme du public et de la cour pour les anciens chefs-d’Ɠuvre qu’allait proscrire l’inconstance de la mode ? Il est vrai que ce mĂȘme Corneille et que la Fontaine n’eurent qu’une part modique Ă  ses libĂ©ralitĂ©s ; mais les rois oublient facilement ceux qui ne s’offrent point Ă  leurs regards, surtout quand ils ont le malheur d’ĂȘtre, comme Louis XIV, guerriers et conquĂ©rants. Cependant, les leçons des grands orateurs et des grands Ă©crivains ne furent pas tout Ă  fait perdues pour lui. Corneille, dans des vers composĂ©s pour un divertissement ; Boileau, dans ses belles Ă©pĂźtres ; Bossuet, dans quelques passages de ses oraisons funĂšbres et de ses sermons ; Racine, dans un mĂ©moire dont le destin fut, comme on le sait, si fatal pour son auteur ; la BruyĂšre, dans quelques pages Ă©loquentes ; FĂ©nelon et Massillon, avec un zĂšle plus courageux que tous les autres, semblaient avoir conspirĂ© pour sauver ce monarque de l’abĂźme presque inĂ©vitable oĂč tombent les conquĂ©rants, et oĂč ils entraĂźnent leurs peuples. Vers la dixiĂšme annĂ©e de son rĂšgne, c’est-Ă -dire de l’époque oĂč il rĂ©gna par lui-mĂȘme, Louis conçut la noble pensĂ©e d’écrire des instructions pour le Dauphin, en mettant sous les yeux de ce jeune prince le dĂ©tail de ses plus importantes opĂ©rations, les secrets de sa politique et ceux de sa conscience comme roi. Cette occupation, qui lui rappelait des souvenirs glorieux, ennoblit ses loisirs pendant quelques annĂ©es. Pour mettre en ordre les pensĂ©es qui lui Ă©chappaient, ou pour les rĂ©diger avec plus de correction et d’élĂ©gance, il eut recours Ă  la plume de PĂ©lisson. Les Ă©bauches de ce travail sont parvenues Ă  la postĂ©ritĂ© ; rien n’est plus facile que d’y dĂ©mĂȘler ce qui appartient au royal Ă©crivain, et ce qui a Ă©tĂ© embelli par l’habile rĂ©dacteur. L’ñme de Louis XIV s’y montre Ă  dĂ©couvert dans les Ă©panchements mĂȘmes de son orgueil. Il se propose toujours pour modĂšle Ă  son fils mais ce genre d’égoĂŻsme n’a rien de repoussant, parce que le style a toujours de la simplicitĂ©, souvent de l’énergie, quelquefois de la profondeur, et surtout parce qu’on reconnaĂźt dans une confession si superbe les sentiments d’un honnĂȘte homme, ceux d’une Ăąme ardente et forte, plus ou moins altĂ©rĂ©s par les maximes de l’autoritĂ© absolue et par les sĂ©ductions de la fortune. Louis XIV donna un nouveau lustre Ă  l’AcadĂ©mie française par des distinctions honorables. Il fonda, en peu d’annĂ©es, l’AcadĂ©mie de peinture et de sculpture 1648, celle des inscriptions et belles-lettres 1663, celle des sciences 1666, l’AcadĂ©mie des Ă©lĂšves de Rome 1667, fit construire l’Observatoire de Paris, et s’occupa du Jardin de botanique ; magnifiques et solides Ă©tablissements qui ont portĂ© si loin la gloire du nom français. Il donna des pensions Ă  plusieurs savants Ă©trangers, tels que Heinsius, Vossius, Huyghens, et depuis appela en France les Cassini, les Bernoulli, commanda les beaux voyages de Tournefort, fit mesurer la mĂ©ridienne de Paris, fondement du plus beau travail gĂ©odĂ©sique connu dans l’histoire ; continua le Louvre sur un plan magnifique, et fit Ă©lever par le gĂ©nie d’un Français, Charles Perrault, l’admirable façade du plus beau palais du monde. Louis XIV ne pouvait pardonner aux Hollandais l’intervention par laquelle ils avaient bornĂ© ses conquĂȘtes et modĂ©rĂ© ses avantages dans la paix d’Aix-la-Chapelle, ni les bravades arrogantes de quelques-uns de leurs magistrats, ni les traits amers que les journaux de cette rĂ©publique lançaient contre lui. Surtout il brĂ»lait du dĂ©sir d’essayer encore une fois ses forces, et d’annoncer par un dĂ©but Ă©clatant la puissante marine qu’il venait de crĂ©er par les soins de Colbert. Il s’unit avec le roi d’Angleterre, par l’entremise de Madame. Le prodigue Charles II reçut avec joie les subsides qui lui furent offerts. Louis n’eut point de peine Ă  sĂ©duire par le mĂȘme appĂąt deux petits souverains, les Ă©vĂȘques de Munster et de Cologne, animĂ©s de la haine la plus vive contre la rĂ©publique, leur voisine. Le dernier lui ouvrit le passage le plus commode pour frapper les Hollandais de coups aussi terribles qu’inattendus. Wesel, Rheinberg et d’autres petites villes sur le Rhin furent prises par le roi dĂšs l’ouverture de la campagne. BientĂŽt la fortune lui offrit l’occasion d’accomplir un de ces faits qui Ă©tonnent l’imagination des peuples, et qui ont un attrait tout particulier pour les Français. Le comte de Guiche annonça que la sĂ©cheresse de la saison avait formĂ© un guĂ© sur un bras du Rhin, et qu’en nageant pendant l’espace de vingt pas, la cavalerie française pourrait franchir un fleuve si renommĂ©. Il Ă©tait dans le gĂ©nie du grand CondĂ© de tenter un tel moyen ; il n’eut pas de peine Ă  le faire goĂ»ter au roi. Deux mille hommes, qui gardaient l’autre rive, furent interdits Ă  la vue de cette cavalerie qui passait le fleuve. L’armĂ©e n’eut presque Ă  regretter que le jeune duc de Longueville. Le grand CondĂ© eut un poignet fracassĂ© en dĂ©tournant un pistolet qui lui fut tirĂ© Ă  bout portant. Louis, qui s’était exposĂ© sur la tranchĂ©e dans quelques siĂšges, et particuliĂšrement Ă  celui de Lille, eut pourtant la prudence de passer le Rhin sur un pont de bateaux avec son infanterie. Cette circonstance diminuait un peu l’éclat de cette journĂ©e. Le talent d’un de nos premiers postes n’a pas peu contribuĂ© Ă  rendre immortel ce passage du Rhin, que l’on comparait dans le temps Ă  celui du Granique. La Hollande Ă©tait surprise ; une terreur panique avait saisi tous ses chefs militaires. Les forts les plus vantĂ©s se rendaient aprĂšs quelques jours de siĂšge, et souvent Ă  la premiĂšre sommation. Les bras de mer n’étaient plus que des barriĂšres inutiles. Le roi aidait au prestige et Ă  la facilitĂ© de cette conquĂȘte par l’excellente discipline qu’il faisait observer Ă  ses troupes. On eĂ»t dit qu’il prenait possession de l’une de ses provinces. Celles d’Utrecht, d’Over-Yssel et de Gueldre Ă©taient soumises. Amsterdam n’avait presque plus pour dĂ©fense que le dĂ©sespoir de ses habitants et le souvenir des longs et glorieux combats soutenus autrefois pour la libertĂ©. Quelques historiens prĂ©tendent que Louis XIV, avec plus d’audace et de cĂ©lĂ©ritĂ©, eĂ»t pu prĂ©venir le rĂ©veil de ce peuple ; mais des rĂ©publiques animĂ©es de l’esprit qui a prĂ©sidĂ© Ă  leur naissance ne succombent pas ainsi d’un seul coup. On peut prĂ©sumer que ce prince eut un juste pressentiment du nouveau genre d’obstacles que susciterait contre lui le patriotisme rĂ©publicain. Sur le chemin d’Amsterdam, il quitta son armĂ©e pour reprendre celui de la capitale peut-ĂȘtre aussi voulait-il ĂȘtre plus Ă  portĂ©e de surveiller les mouvements politiques des cabinets que la jalousie et l’inquiĂ©tude allaient armer contre lui. L’ivresse des Français Ă©tait au comble ; elle Ă©clata dans un triomphe que Louis eut la faiblesse de se dĂ©cerner Ă  lui-mĂȘme. Les fĂȘtes n’en avaient point encore cessĂ©, quand on apprit que la Hollande Ă©tait sauvĂ©e de sa ruine, qu’une rĂ©volution avait Ă©clatĂ© Ă  Amsterdam ; que le prince d’Orange, ĂągĂ© de vingt-deux ans, venait dans le pĂ©ril de la patrie de se crĂ©er une sorte de dictature ; qu’il avait excitĂ© les fureurs de la populace contre le grand pensionnaire de Witt, contre le frĂšre de cet illustre rĂ©publicain, et quelques autres magistrats coupables Ă  ses yeux du tort d’avoir voulu rĂ©primer les projets de son ambition, coupables aux yeux du peuple des torts de la fortune ; que les cruautĂ©s commises sur leurs cadavres avaient Ă©tĂ© le prĂ©texte d’un terrible engagement pour les auteurs de cette rĂ©volution Ă  la fois fĂ©roce et patriotique ; que les ordres du stathouder avaient fait percer des digues et environner d’une mer nouvelle Amsterdam, Leyde et leurs environs ; enfin qu’une victoire remportĂ©e par l’amiral Ruyter sur les escadres combinĂ©es d’Angleterre et de France avait mis les cĂŽtes de la Hollande Ă  l’abri de toute invasion. On vit avec Ă©tonnement l’Empire et l’Espagne s’armer pour la dĂ©fense d’une rĂ©publique si longtemps ennemie de la maison d’Autriche. Le roi d’Angleterre Ă©tait dĂ©savouĂ© dans ses entreprises par son parlement, par le cri de la nation. Le prince d’Orange remuait tout contre Louis XIV, et lui faisait expier l’injustice de son agression, le stĂ©rile Ă©clat de ses victoires et l’orgueil indiscret de ses triomphes. Toute l’Europe insultait Ă  la grandeur théùtrale du nouveau conquĂ©rant ; mais bientĂŽt il la força d’admirer la grandeur vĂ©ritable d’un roi. L’armĂ©e française tint peu dans la Hollande ; cependant, comme l’hiver avait glacĂ© les inondations, le marĂ©chal de Luxembourg lança sur cette mer de glace douze mille Français ils avancĂšrent avec intrĂ©piditĂ© ; mais un dĂ©gel qui survint les obligea de repasser Ă  la hĂąte sur une digue Ă©troite et fangeuse ; beaucoup y pĂ©rirent ; tous Ă©taient perdus si le commandant d’un fort avait inquiĂ©tĂ© leur retraite. Ils l’achevĂšrent et la souillĂšrent par d’indignes cruautĂ©s. Mais bientĂŽt le roi changea le théùtre de ses opĂ©rations ; et se portant sur la Franche-ComtĂ©, il soumit cette province, non pas tout Ă  fait avec autant de rapiditĂ© que la premiĂšre fois, mais avec plus de gloire. Rien ne put tenir devant le gĂ©nie de Vauban et l’audace des troupes que Louis enflammait par sa prĂ©sence, quelquefois par ses pĂ©rils. Pendant ce temps Turenne dĂ©fendait l’Alsace avec vingt-quatre mille hommes, contre une armĂ©e de soixante-dix mille ImpĂ©riaux. On ne vit jamais une campagne dĂ©fensive conduite avec un savoir plus profond, avec plus d’éclat et de succĂšs. Les troupes allemandes ne purent se prĂ©valoir de leur immense supĂ©rioritĂ©. Le gĂ©nie d’un seul homme semblait avoir triplĂ© le nombre de ses soldats. L’armĂ©e victorieuse n’éprouvait que des pertes lĂ©gĂšres ; et le soldat français aimait des marches pĂ©nibles et savantes, dont il devinait le but avec une sagacitĂ© qu’il tenait de son gĂ©nĂ©ral et de ses victoires. Malheureusement, cette campagne, oĂč l’art de la guerre obtenait son plus beau rĂ©sultat, celui de sauver les frontiĂšres du royaume en mĂ©nageant le sang de ses dĂ©fenseurs, fut souillĂ©e par l’incendie de deux villes et de vingt-cinq beaux villages du Palatinat ; rigueur barbare, indigne des temps modernes et d’un siĂšcle Ă  la fois Ă©clairĂ© et chrĂ©tien. Cette dĂ©vastation n’avait pas pour excuse la nĂ©cessitĂ©, puisqu’elle ne couvrait qu’un mĂ©diocre espace de terrain, et ne succĂ©dait point Ă  un grand revers. Turenne, sans doute, obĂ©issait Ă  des ordres de Louvois. Mais il devait ĂȘtre assez grand pour dĂ©sobĂ©ir, mĂȘme au risque d’une disgrĂące. Dans la campagne suivante, les ImpĂ©riaux opposĂšrent Ă  Turenne un tacticien renommĂ©, Montecuculli. L’habiletĂ© de leurs campements et de leurs manƓuvres balança l’admiration de l’Europe. On s’attendait Ă  une action dĂ©cisive, lorsqu’un coup de canon enleva Turenne au moment oĂč il marquait la place pour une batterie. Que dirons-nous sur les regrets que la France donna Ă  la perte de Turenne ? L’éloquence naĂŻve de madame de SĂ©vignĂ© nous l’apprend encore mieux que la haute Ă©loquence de FlĂ©chier. Louis ordonna que les restes du hĂ©ros fussent dĂ©posĂ©s avec ceux des rois pendant quinze ans il l’avait dĂ©fendu contre la haine de Louvois. La mort de ce grand homme de guerre Ă©tait une cruelle Ă©preuve pour la fortune du roi. Les Ă©vĂ©nements accrurent encore de si justes regrets. Le marĂ©chal de CrĂ©qui fut battu Ă  ConsarbrĂŒck, avec le reste de cette mĂȘme armĂ©e que Turenne avait rendue si redoutable. ForcĂ© de se retirer dans TrĂšves avec de faibles dĂ©bris, CrĂ©qui se prĂ©parait Ă  une belle dĂ©fense ; mais une trahison livra la ville, le gĂ©nĂ©ral et l’armĂ©e. Le prince de CondĂ© venait de remporter dans la Flandre une victoire inutile et meurtriĂšre. Louis le fit partir pour l’Alsace ; et l’habile Montecuculli se vit arrĂȘtĂ© dans ses progrĂšs, et forcĂ© de lever le siĂšge de Haguenau. Peu de temps aprĂšs, le marĂ©chal de CrĂ©qui, rachetĂ© de sa prison, rĂ©para son imprudence et son malheur par une suite d’avantages obtenus sur les deux rives du Rhin, de concert avec le marĂ©chal de Lorges. Des succĂšs plus brillants et plus utiles Ă©taient rĂ©servĂ©s Ă  Louis dans la Flandre. AidĂ© de Vauban, il prit en personne CondĂ©, Bouchain, Cambrai, aprĂšs des siĂšges mĂ©morables qui laissaient les Français sans rivaux dans cet art. Quant Ă  la prise de Valenciennes, exĂ©cutĂ©e Ă©galement sous les yeux du roi, la bravoure française n’a point Ă  citer un prodige plus Ă©clatant. AprĂšs quelques jours de siĂšge, on avait rĂ©solu d’attaquer le grand ouvrage Ă  cornes ; il est enlevĂ© les mousquetaires cĂšdent Ă  leur ardeur, poursuivent les assiĂ©gĂ©s de retranchement en retranchement, arrivent avec eux aux portes de la ville, baissent le pont-levis, gagnent du terrain de maison en maison, reçoivent des renforts, et font capituler trois mille hommes qui dĂ©fendent l’une des plus fortes places de l’Europe. Un peu aprĂšs cet exploit, Monsieur, prince effĂ©minĂ©, timide Ă  la cour, se montra dans les combats digne petit-fils de Henri IV, et il obtint Ă  Mont-Cassel une victoire signalĂ©e sur le prince d’Orange. L’éclat en fut tel, que le roi rĂ©solut de ne plus laisser Ă  son frĂšre une telle occasion de gloire. En mĂȘme temps les Espagnols se voyaient pressĂ©s par nos armĂ©es jusque dans la Sicile. Pour que rien ne manquĂąt Ă  ce vaste dĂ©veloppement de puissance, notre marine naissante, conduite par Duquesne, s’était mesurĂ©e avec avantage contre les flottes combinĂ©es des Anglais, des Hollandais et des Espagnols, commandĂ©es par Ruyter, que les Français eux-mĂȘmes nommaient le Turenne des armĂ©es navales. Notre pavillon dominait sur les mers, tandis que sur le continent Louis accablait ses ennemis par des succĂšs dignes des plus grands capitaines et des plus grands peuples de l’antiquitĂ©. Il mit le comble Ă  sa gloire en offrant la paix aux vaincus, et put se montrer Ă  la fois superbe et gĂ©nĂ©reux. Il rendit aux Hollandais l’importante place de MaĂ«stricht ; aux Espagnols, un grand nombre de villes dans les Pays-Bas, en se rĂ©servant CondĂ©, Bouchain, Ypres, Valenciennes, Cambrai, Maubeuge, Saint-Omer, Cassel, Charlemont et toute la Franche-ComtĂ©. De toutes ses conquĂȘtes sur les ImpĂ©riaux, il ne gardait que Fribourg. Il resta maĂźtre de la Lorraine, qui ne lui Ă©tait point cĂ©dĂ©e, mais qu’il ne rendit pas. Telle fut la glorieuse paix de NimĂšgue, signĂ©e le 10 aoĂ»t 1678. Ce fut alors que la France et l’Europe lui donnĂšrent Ă  la fois le nom de Grand, surnom presque toujours fatal aux peuples qui le dĂ©cernent et mĂȘme aux princes auxquels il est dĂ©cernĂ©, parce qu’étant, par un malheureux prĂ©jugĂ©, le prix des exploits guerriers, il en perpĂ©tue l’ivresse. Cette guerre n’avait point Ă©puisĂ© le trĂ©sor royal. Les bĂ©nĂ©fices du commerce, soutenus par une marine puissante, avaient beaucoup augmentĂ© les richesses de la France. Magnifique pendant la guerre, Louis XIV le fut encore plus aprĂšs la paix. BientĂŽt commencĂšrent les fastueuses constructions de Versailles, modeste chĂąteau de Louis XIII, Ă©rigĂ© dans l’une de ses façades en palais du soleil et conservant dans l’autre sa simplicitĂ© peu Ă©lĂ©gante ; de Trianon, dont un caprice royal fit un palais des fĂ©es ; des aqueducs de Maintenon, des rouages hydrauliques de Marly, dĂ©fis splendides portĂ©s Ă  la nature par l’orgueil du monarque ; de ces parcs, de ces jardins renfermant mille stĂ©riles richesses dans des enclos dĂ©mesurĂ©s. Ces dispendieuses merveilles pervertissaient un luxe jusque-lĂ  si grand et si judicieux, et cependant elles ne dĂ©tournaient ni Louis ni ses sujets de travaux vraiment utiles. Riquet avait achevĂ© le canal des deux mers, qui eĂ»t suffi pour immortaliser un rĂšgne. La navigation intĂ©rieure tirait un nouveau secours du canal de Briare. Toutes les villes principales Ă©taient enrichies de monuments dont l’énumĂ©ration serait immense. Enfin, le grand cƓur de Louis XIV respirait dans le magnifique Ă©tablissement des Invalides, oĂč sont empreints tous les plus beaux sentiments de l’homme, c’est-Ă -dire la piĂ©tĂ©, la reconnaissance, le respect pour la vieillesse, pour le malheur et la bravoure. Colbert gĂ©missait des dĂ©penses qui n’avaient pas cette utilitĂ© pour objet ; mais timide dans ses remontrances, il Ă©tait faiblement Ă©coutĂ©. L’ascendant de Louvois prĂ©valut. Ce ministre, qui s’attribuait le principal honneur d’une guerre si heureusement conduite et terminĂ©e, rendait la paix pleine de menaces et d’agressions contre divers États. Par ses conseils, le roi n’avait presque rien retranchĂ© de son Ă©tat militaire ; tandis que les puissances vaincues, cĂ©dant Ă  la nĂ©cessitĂ©, s’empressaient de licencier leurs troupes. Louis se vit ainsi dans une position fatale, celle oĂč l’on croit pouvoir tout oser. Strasbourg, aprĂšs la conquĂȘte de l’Alsace, avait conservĂ© l’existence d’une ville libre impĂ©riale. L’or de la France suscitait depuis longtemps des troubles dans cette petite rĂ©publique. Les magistrats Ă©taient inquiĂ©tĂ©s par des menaces sĂ©ditieuses. La crainte, la vengeance et la cupiditĂ© les portĂšrent Ă  livrer leur patrie. BientĂŽt on eut Ă  se plaindre de quelques retards apportĂ©s par les Espagnols Ă  l’exĂ©cution du dernier traitĂ©. On s’empara de la formidable place de Luxembourg, aprĂšs un long blocus et un bombardement. Mais ce qui rendait cette conquĂȘte odieuse, c’est que l’Empire, dont Louis XIV envahissait les possessions, Ă©tait alors exposĂ© Ă  une nouvelle invasion des Turcs. L’empereur LĂ©opold appelait Ă  son secours tous les princes de la chrĂ©tientĂ©. L’Autriche espagnole, que le roi venait d’accabler encore par la prise de TrĂšves, de Courtrai et de Dixmude, ne put envoyer de secours Ă  l’Autriche allemande. Mais deux hĂ©ros, Sobieski, roi de Pologne, et le prince Charles de Lorraine, dĂ©pouillĂ© de ses Ă©tats, mĂ©ritĂšrent toutes les louanges et toutes les bĂ©nĂ©dictions de l’Europe, en dĂ©livrant Vienne et en repoussant les Turcs jusque sur leur frontiĂšre. Le monarque français fut arrĂȘtĂ© par des scrupules tardifs. Il ne donna plus de suite Ă  la facile invasion de la Flandre. La paix de NimĂšgue fut convertie en une trĂȘve de vingt ans, et Louis se fit payer d’une modĂ©ration suspecte en gardant la possession de Luxembourg. Lui-mĂȘme, une annĂ©e auparavant, s’était prĂ©sentĂ© comme un vengeur de la chrĂ©tientĂ©. Les puissances barbaresques ayant fait d’indignes outrages Ă  son pavillon, le roi irritĂ© envoya contre ces pirates le hĂ©ros de la marine française. Duquesne, avec une flotte puissante. Alger, bombardĂ© deux fois, Tunis et Tripoli, qui craignirent le mĂȘme sort, se soumirent Ă  toutes les rĂ©parations qu’exigea l’impĂ©rieux monarque. Il reprocha aux GĂ©nois d’avoir vendu quelques secours aux AlgĂ©riens. Pour punir ces rĂ©publicains de cette dĂ©loyale aviditĂ©, il les soumit au mĂȘme chĂątiment qu’il venait d’infliger Ă  des barbares. GĂȘnes la magnifique fut foudroyĂ©e par les galĂšres du roi de France, et des palais de marbre enrichis des plus prĂ©cieuses productions des beaux-arts s’écroulĂšrent sous des bombes. GĂȘnes tĂ©moigna son repentir par les plus humbles soumissions. Le doge et quatre principaux sĂ©nateurs vinrent Ă  Versailles demander grĂące pour leur rĂ©publique. Cette excessive fiertĂ© du roi lui nuisait encore plus que son ambition. Il n’était ni assez insensĂ©, ni assez inhumain pour aspirer Ă  la monarchie universelle nĂ©anmoins l’Europe le crut capable d’un tel dessein, parce que son orgueil semblait arriver au mĂȘme point que s’il l’eĂ»t obtenue. L’ambassade qu’imagina d’envoyer un usurpateur du trĂŽne de Siam Ă  ce prince, qui ne possĂ©dait qu’un comptoir dans les Indes, flatta singuliĂšrement la vanitĂ© des Français en amusant leur curiositĂ© ; mais les puissances maritimes dont le pavillon dominait sur les mers sourirent d’une pompe si vaine, des projets chimĂ©riques qu’elle enfanta, et du mauvais succĂšs d’une expĂ©dition chargĂ©e Ă  la fois de secourir le roi de Siam et de convertir le peuple indien. Tandis que le roi au sein d’une paix trop agitĂ©e commettait des fautes que deux ligues successives, et surtout la derniĂšre, devaient lui faire cruellement expier, il couvrait nos frontiĂšres et nos ports de ces admirables fortifications, oĂč Vauban dĂ©ploya toute l’étendue de son gĂ©nie, et Louis toute l’étendue de sa prĂ©voyance royale. La triple enceinte de places fortes Ă©levĂ©es ou rĂ©parĂ©es sur la frontiĂšre du nord, et qui se prolongeaient sur celle de l’est, semblait annoncer que Louis XIV, en assurant ses conquĂȘtes, consentait Ă  imposer des limites. Mais l’Europe, choquĂ©e de son orgueil, ne crut pas Ă  ce signe de modĂ©ration. De toutes les grandes constructions de ce prince il n’en est point qui doive rendre sa mĂ©moire plus chĂšre et plus respectable aux Français. Cependant la mort de Colbert venait d’augmenter le crĂ©dit de Louvois. Ce ministre obsĂ©dait Louis de projets despotiques, et se rendait plus dangereux pour lui que n’eĂ»t pu l’ĂȘtre tout un peuple de flatteurs. Le roi, quoique encore Ă©loignĂ© de la vieillesse, commençait Ă  montrer une rĂ©gularitĂ© sĂ©vĂšre dans ses mƓurs. Sa cour, plus splendide que jamais, ne retraçait presque plus rien de la gaietĂ© brillante des premiĂšres annĂ©es de ce rĂšgne. On ne savait si l’on devait bĂ©nir ou accuser madame de Maintenon d’une rĂ©forme trop chagrine. Le monarque ne se plaisait plus qu’auprĂšs d’elle. Une tendre amitiĂ© lui fit faire ce que jamais la passion n’eĂ»t obtenu de lui peu de temps aprĂšs la mort de la reine il Ă©pousa madame de Maintenon. Son orgueil cependant ne put admettre qu’un mariage clandestin, dont l’existence n’est pas douteuse, mais dont l’époque est restĂ©e incertaine. Mais Louis compromit toute la gloire de son rĂšgne et en affaiblit les plus puissants ressorts par la rĂ©vocation de l’édit de Nantes, ou plutĂŽt par les violences qu’on exerça en son nom dans l’exĂ©cution de cette mesure. Louvois haĂŻssait dans les protestants les protĂ©gĂ©s de Colbert tandis que la France jouissait du plus brillant essor de leur industrie, il leur faisait un crime de leurs richesses, et ne tenait aucun compte de l’esprit de paix auquel ils avaient Ă©tĂ© amenĂ©s par le travail, encore plus que par le malheur. Le roi, dĂšs le commencement de son rĂšgne, s’était proposĂ© de les exclure de tous les emplois. Cette prĂ©caution, secondĂ©e par le zĂšle de plusieurs prĂ©lats, avait dĂ©jĂ  dĂ©tachĂ© de cette religion tous les nobles qui lui avaient prĂȘtĂ© autrefois un si redoutable appui. Que pouvait-on craindre des protestants, lorsqu’ils perdaient par cette dĂ©fection toute ombre de puissance politique et militaire ? Louvois chercha tous les moyens de les irriter, afin de leur arracher quelques murmures dont le roi fĂ»t offensĂ©. Depuis 1670, tous les ans il paraissait quelque Ă©dit qui restreignait la tolĂ©rance. Des soldats et surtout des dragons se rĂ©pandirent dans les provinces oĂč le protestantisme Ă©tait encore professĂ© ; ils appuyaient par leurs armes les prĂ©dications des Ă©vĂȘques, des curĂ©s et les menaces des intendants. Les protestants, troublĂ©s perpĂ©tuellement dans leur asile, rançonnĂ©s et ne pouvant dĂ©fendre leurs femmes et leurs filles de l’insolente soldatesque, cĂ©daient pour la plupart Ă  l’orage. On vit partout des conversions subites et promptement rĂ©tractĂ©es. Par ces mesures, Louvois n’avait fait que prĂ©parer le coup le plus cruel et le plus aveugle du despotisme Louis se rĂ©solut Ă  le frapper octobre 1685. Le culte de l’Église rĂ©formĂ©e fut interdit dans toutes les provinces, exceptĂ© en Alsace, oĂč il Ă©tait protĂ©gĂ© par une capitulation rĂ©cente. Les ministres de cette religion reçurent l’ordre de sortir du royaume sous peine de mort quinze mille familles protestantes qui les suivirent en exil se vengĂšrent de leur ingrate patrie, ou plutĂŽt de leur cruel gouvernement, en rĂ©pandant en Allemagne, en Angleterre, en Hollande, les secrets les plus prĂ©cieux de nos manufactures. La persĂ©cution n’en fut que plus implacable contre ceux auxquels leur misĂšre interdisait ce douloureux exil ; le dĂ©sespoir fit prendre les armes Ă  de malheureux paysans des CĂ©vennes, qui s’aguerrirent au point de pouvoir vingt ans plus tard se dĂ©fendre avec quelque succĂšs contre les armes de deux marĂ©chaux de France. La plupart des Ă©vĂȘques du royaume crurent devoir applaudir au rĂ©sultat d’une mesure qu’aucun d’eux n’avait provoquĂ©e ; les magistrats, les courtisans et mĂȘme les gens de lettres cĂ©lĂ©brĂšrent l’exil de soixante mille Français. Les protestants fugitifs allĂšrent partout rĂ©veiller contre Louis XIV des haines que l’éclat de sa gloire avait au moins rendues muettes. Le prince d’Orange se flatta pour cette fois de diriger avec plus de succĂšs une ligue qui depuis la paix de NimĂšgue lui reprochait ses pertes et ses humiliations. Les liens de cette ligue Ă©taient dĂ©jĂ  resserrĂ©s, lorsqu’une nouvelle rĂ©volution, excitĂ©e ou du moins secondĂ©e par lui-mĂȘme en Angleterre, prĂ©cipita du trĂŽne l’imprudent frĂšre du prodigue Charles II. Louis XIV n’eut que trop Ă  se reprocher les malheurs de Jacques II, dont il n’avait cessĂ© d’exciter les volontĂ©s despotiques, qui ne firent que rĂ©volter les esprits tout disposĂ©s Ă  Ă©clater quand le prince d’Orange, gendre de Jacques II, entreprit son expĂ©dition parricide. A peine sa puissante flotte fut-elle signalĂ©e sur les cĂŽtes d’Angleterre, que la conspiration se dĂ©clara. Le roi Jacques, malgrĂ© sa bravoure personnelle, ne put tenter la fortune d’un combat trahi par les siens jusque dans sa fuite, il fut ramenĂ© Ă  Londres. Mais Guillaume craignit de joindre au nom d’usurpateur un nom plus odieux encore il fut permis Ă  Jacques II de se rendre avec sa famille Ă  la cour de France. L’Europe ne vit jamais une scĂšne plus auguste d’hospitalitĂ© le roi vint au-devant des illustres fugitifs, leur tint le langage le plus noble, le plus touchant ; voulut que Jacques II jouĂźt Ă  Saint-Germain de tous les honneurs que dans des jours plus prospĂšres il eĂ»t pu recevoir dans ses propres États ; il lui donna une partie de ses gardes, pourvut Ă  ses dĂ©penses par une pension de 800 000 francs, et embellit ses prĂ©sents multipliĂ©s par une dĂ©licatesse dont la cour de France offrait seule encore le modĂšle. Il ne se bornait pas Ă  ces soins magnifiques un armement formidable Ă©tait destinĂ© Ă  faire remonter Jacques II sur le trĂŽne ; c’était Ă  qui briguerait l’honneur de monter sur les vaisseaux chargĂ©s d’une si honorable mission. Les Français avaient Ă©tĂ© rĂ©voltĂ©s de l’action de Guillaume et de son Ă©pouse ; son crime Ă©tait Ă©loquemment dĂ©noncĂ© par nos grands Ă©crivains. Louis, quoiqu’il eĂ»t commis la plupart des fautes auxquelles on doit imputer les malheurs du dĂ©clin de son rĂšgne, Ă©tait encore aimĂ©. La douleur avait Ă©tĂ© presque universelle dans le royaume, lorsque dans l’annĂ©e 1686 on apprit que sa santĂ© Ă©tait altĂ©rĂ©e et qu’il avait subi l’opĂ©ration, dangereuse alors, de la fistule. DĂšs qu’on fut assurĂ© de sa guĂ©rison, les Ă©glises et toutes les assemblĂ©es publiques retentirent d’actions de grĂąces qui Ă©taient rĂ©pĂ©tĂ©es mĂȘme dans l’intĂ©rieur des familles. On ne fut saisi d’aucune Ă©pouvante lorsque l’on vit l’annĂ©e 1688, l’Espagne, le duc de Savoie, plusieurs autres princes d’Italie, l’Angleterre, la Hollande, l’Autriche, la plupart des princes et villes de l’Allemagne, enfin jusqu’au roi de SuĂšde, dĂ©clarer la guerre Ă  la France. L’esprit militaire de la cour entraĂźnait encore la nation ; la grandeur du monarque semblait augmenter par le nombre de ses ennemis il Ă©tait encore aidĂ© par Louvois, mais non plus par ce Colbert qui avait trouvĂ© le secret de rendre la France florissante au milieu de guerres vives et prolongĂ©es. Ses flottes et cinq armĂ©es de terre, tout fut prĂȘt Ă  la fois, tout s’émut avec de brillantes espĂ©rances de victoire. Le dĂ©but de la campagne maritime surpassa tous les exploits par lesquels nos armĂ©es navales s’étaient annoncĂ©es nos vaisseaux portĂšrent Jacques II sur les cĂŽtes de l’Irlande, oĂč il dĂ©barqua, secondĂ© par un parti assez puissant, et lui firent parvenir successivement divers renforts. Les flottes anglaise et hollandaise se prĂ©sentĂšrent enfin ; Tourville et d’EstrĂ©es vinrent Ă  leur rencontre avec 72 grands vaisseaux, et remportĂšrent une victoire complĂšte 17 vaisseaux ennemis furent dĂ©truits ou dĂ©mĂątĂ©s. Pendant ce temps une armĂ©e française, conduite par le Dauphin, faisait en Allemagne de rapides conquĂȘtes ; le siĂšge de Philisbourg, dirigĂ© par Vauban, avait rappelĂ© les siĂšges si glorieux de Lille et de Valenciennes. Manheim, Spire, Worms et plusieurs villes du Palatinat avaient ouvert leurs portes Ă  l’armĂ©e victorieuse ; mais plĂ»t Ă  Dieu que nos armĂ©es eussent Ă©tĂ© repoussĂ©es de ce Palatinat, qui devait ĂȘtre le théùtre d’une seconde barbarie de Louvois. L’électeur palatin n’était entrĂ© qu’à regret dans la ligue d’Augsbourg ; son peuple n’avait pris aucune part aux opĂ©rations militaires. On Ă©tait au cƓur de l’hiver, et voilĂ  que Louis, malheureusement trop docile aux conseils de son ministre, signe l’ordre d’incendier l’un des pays les plus florissants de l’Europe Manheim, Heidelberg, d’autres petites villes et plus de cinquante villages furent la proie des flammes. Louis XIV, par l’horreur qu’excita cette odieuse exĂ©cution, donna lui-mĂȘme un lien de plus Ă  la ligue formĂ©e contre lui. De nouveaux gĂ©nĂ©raux, Ă©lĂšves de Turenne et de CondĂ©, parurent sur la scĂšne ; mais la France fut cette fois accablĂ©e d’un luxe de victoires stĂ©riles. Catinat Ă©tait de tous ces gĂ©nĂ©raux celui qui rappelait le plus le gĂ©nie, la prudence et la modestie de Turenne ; le roi lui avait confiĂ© le soin de la guerre d’Italie. Les Français trouvĂšrent sur ce point un prince aussi habile Ă  la guerre que versĂ© dans tous les secrets d’une politique astucieuse c’était Victor-AmĂ©dĂ©e, duc de Savoie. Catinat par son activitĂ© triompha de tous les efforts de ce prince, et le battit dans les deux journĂ©es de Staffarde et de Marseille ; mais tandis qu’il pĂ©nĂ©trait en vainqueur dans le PiĂ©mont, Victor-AmĂ©dĂ©e se jeta sur le DauphinĂ© cette diversion imprĂ©vue arrĂȘta les progrĂšs de Catinat. Le marĂ©chal de Noailles ne se bornait point Ă  une guerre dĂ©fensive sur la frontiĂšre des PyrĂ©nĂ©es ; aprĂšs avoir remportĂ© sur les Espagnols la bataille d’Outer, il prit Gironne. Mais son armĂ©e Ă©tait trop faible pour s’engager dans de nouvelles conquĂȘtes les regards se portaient principalement sur la guerre des Pays-Bas, ou le marĂ©chal de Luxembourg avait en tĂȘte le roi Guillaume. Ce dernier venait de se mesurer contre son beau-pĂšre dans les plaines de l’Irlande, avait remportĂ© sur lui la victoire dĂ©cisive de la Boyne, et pour la seconde fois l’avait forcĂ© Ă  la fuite. Jacques II, de retour en France, y trouva les mĂȘmes Ă©gards que s’il y fĂ»t revenu victorieux et vengĂ©. Louis XIV, malheureusement pour notre marine, n’avait point encore renoncĂ© Ă  l’espoir de faire rentrer les Anglais sous le joug de ce prince la funeste bataille de la Hague fut le rĂ©sultat de cette obstination. Tourville et d’EstrĂ©es, qui s’étaient si bien secondĂ©s jusque-lĂ , furent sĂ©parĂ©s dans leurs opĂ©rations, soit par la fortune, soit par quelque secrĂšte mĂ©sintelligence. L’amiral Russel, qui commandait les flottes anglaise et hollandaise, brĂ»la 14 de nos vaisseaux, et mit en fuite tout le reste. L’amiral anglais ne mit pas notre flotte en dĂ©route. Quarante vaisseaux français soutinrent pendant dix-sept heures le combat contre quatre-vingt-huit vaisseaux anglo-hollandais Ă  la fin de cette lutte prodigieuse, pas un vaisseau français n’était pris ou coulĂ©, tandis que trois vaisseaux ennemis avaient Ă©tĂ© obligĂ©s d’amener leur pavillon. Jusque-lĂ  cette bataille Ă©tait, bien qu’indĂ©cise dans ses rĂ©sultats matĂ©riels, une grande victoire au point de vue de l’effet moral. Mais notre flotte avait beaucoup souffert, et nous n’avions pas un seul port sur la Manche oĂč nos vaisseaux pussent se rĂ©fugier. Les treize vaisseaux les plus maltraitĂ©s se retirĂšrent de la rade de la Hague et Ă  Cherbourg, oĂč, par la faute du marĂ©chal de Bellefond et du roi Jacques II, qui ne firent aucune rĂ©sistance, les Anglais vinrent brĂ»ler nos navires. Le reste de la flotte trouva un abri dans le port de Brest. La fortune sembla d’abord abandonner Guillaume dans les combats qu’il soutint contre les Français pour la dĂ©fense des Pays-Bas ; mais il sut tout rĂ©parer par la prodigieuse constance de son Ăąme. DĂ©jĂ , dans les campagnes prĂ©cĂ©dentes, on avait remarquĂ© les talents du marĂ©chal de Luxembourg mais, pendant la paix, il avait conspirĂ© lui-mĂȘme contre sa gloire par d’indignes liaisons et de dĂ©plorables faiblesses. On l’avait vu compromis dans des poursuites qui furent dirigĂ©es contre une devineresse nommĂ©e la Voisin, qu’on accusait de plusieurs crimes. Sur le bruit des accusations portĂ©es contre lui, il vint se prĂ©senter au roi, et demander que la Bastille lui fĂ»t ouverte. Le roi l’y laissa languir quelque temps ; mais enfin il sauva un des hĂ©ros de l’armĂ©e française de l’ignominie d’ĂȘtre associĂ© avec de vils malfaiteurs, fanfarons de sorcellerie. Luxembourg sentait vivement le besoin de se faire une gloire nouvelle. On ne vit jamais les troupes françaises conduites avec plus d’ardeur mais Ă  peine cinq ou six villes furent-elles le prix des victoires tant cĂ©lĂ©brĂ©es de Fleurus, de Leuse, de Steinkerque et de Nerwinde elles excitĂšrent vivement l’enthousiasme des Français, et ne prolongĂšrent que trop leur passion et celle de leur roi pour la guerre. A chacune de ces batailles Guillaume put se retirer en bon ordre ; et les Français Ă©taient trop affaiblis par leurs victoires pour oser le poursuivre. Il n’y en eut point de plus disputĂ©e et de plus meurtriĂšre que celle de Steinkerque. Cinq princes français y firent des prodiges de valeur. C’était Philippe, duc d’OrlĂ©ans, depuis rĂ©gent de France ; c’était Louis, duc de Bourbon, petit-fils du grand CondĂ© ; c’était le prince de Conti, le plus brillant, le plus spirituel et le plus aimĂ© de tous ces jeunes hĂ©ros ; c’étaient enfin deux petits-fils de Henri IV, le duc de VendĂŽme, destinĂ© a une grande gloire militaire, et son frĂšre, le grand prieur, voluptueux tous les deux, mais terribles dans un jour de bataille. On ne suffirait pas Ă  nombrer les beaux faits d’armes de ces princes, et surtout ceux des marĂ©chaux de Luxembourg et de Boufflers. L’ordre royal de Saint-Louis, instituĂ© en 1693, fut la rĂ©compense de la valeur. Les Ă©glises se tapissaient de drapeaux ; mais les armĂ©es de Guillaume n’avaient presque point changĂ© de position. Louis XIV n’avait pas pris Ă  cette guerre une part aussi active que dans les campagnes prĂ©cĂ©dentes. Louvois avait arrangĂ©, pour l’orgueil du roi, le siĂšge de Namur. On rĂ©ussit Ă  prendre cette forteresse Ă  la vue d’une armĂ©e ennemie ; mais, l’annĂ©e suivante, Guillaume vint Ă  bout de la reprendre, quoiqu’elle eĂ»t reçu des fortifications de Vauban. Cependant Louis, malgrĂ© des succĂšs si peu dĂ©cisifs, n’avait fait la guerre que sur le terrain ennemi. Il occupait encore beaucoup de places et de forteresses, quand l’intolĂ©rable fatigue des Français, la misĂšre faisait d’affreux progrĂšs dans le royaume, l’épuisement des finances et le poids d’une dette horriblement accrue, le dĂ©cidĂšrent Ă  signer la premiĂšre paix qui n’ajouta rien Ă  ses possessions 1697. On rendit Ă  l’Espagne Mons, Ath, Courtrai ; Ă  l’Empire, Fribourg, Brisach, Kehl, Philisbourg prĂ©cĂ©demment, on avait rendu au duc de Savoie les villes conquises sur lui pour le dĂ©tacher de la coalition. Tout le but de la plus puissante ligue que l’Europe eĂ»t vue jusque-lĂ  se trouvait manquĂ©. Du reste, la puissance de Louis n’avait souffert aucun Ă©chec. La gloire du nom français Ă©tait encore accrue par un nombre de victoires qui eussent suffi pour illustrer cinq ou six des rĂšgnes prĂ©cĂ©dents mais la France et l’Europe purent Ă  peine respirer pendant prĂšs de trois annĂ©es. Durant les nĂ©gociations de la paix de Ryswyck, les puissances alliĂ©es ne s’étaient point fait scrupule de rĂ©gler le partage des États d’un prince encore vivant et mĂȘme encore jeune, du monarque le plus puissant qui fĂ»t Ă  la tĂȘte de cette ligue, c’est-Ă -dire de Charles II, roi d’Espagne. Ce prince dĂ©pĂ©rissait lentement, et ne laissait aucun hĂ©ritier dans la branche espagnole de l’Autriche. Le roi d’Angleterre, Guillaume, avait proposĂ© un partage favorable Ă  chacun des alliĂ©s, et surtout Ă  la branche allemande d’Autriche, qui Ă©tait appelĂ©e au trĂŽne de l’Espagne et des Indes occidentales. On consentit, dans le cours des nĂ©gociations, Ă  laisser Naples et la Sicile au fils de Louis XIV. Celui-ci semblait content de son partage ; il reprit cette nĂ©gociation avec ardeur aprĂšs la paix. Mais l’empereur, qui espĂ©rait pour son fils l’archiduc toute l’étendue de la succession, refusa de signer. Charles II mourut le 1er novembre 1700. Quel fut l’étonnement de l’Europe, quelles furent ses alarmes, en apprenant que ce roi, qui venait de soutenir deux guerres trĂšs vives contre la France, dont les ancĂȘtres s’étaient montrĂ©s si avides d’envahir nos plus belles provinces, abandonnait, par son testament, la totalitĂ© de ses États au duc d’Anjou, second fils du Dauphin ! Le dĂ©tail des intrigues qui amenĂšrent ce testament nous conduirait trop loin, et ne pourrait d’ailleurs nous amener Ă  aucune certitude historique. Un si prodigieux coup de fortune Ă©tourdit Louis XIV, et ranima un orgueil qui n’avait pas encore pliĂ©, mais qui paraissait se modĂ©rer. Par la mort de Louvois, son maĂźtre s’était vu dĂ©livrĂ© d’un cruel instigateur de guerres. Ce ministre, qui avait travaillĂ© avec un art si funeste Ă  se rendre indispensable, s’était enfin rendu odieux au roi. Dans le cours de la guerre prĂ©cĂ©dente, il avait osĂ© lui proposer de renouveler dans le pays de TrĂšves l’exĂ©crable exemple des deux incendies du Palatinat. Louis, dont le cƓur Ă©tait sans doute poursuivi par ce fatal souvenir, se leva furieux, et fut prĂšs de se livrer Ă  la derniĂšre violence contre son ministre. Louvois tomba malade, pendant un conseil oĂč le roi lui avait adressĂ© de sĂ©vĂšres reproches, et mourut dans la nuit mĂȘme. Louis XIV apprit sa mort, non avec des signes de joie, mais avec ceux d’une profonde indiffĂ©rence. La France, malgrĂ© toutes les pompes de Versailles, Ă©tait encore languissante, extĂ©nuĂ©e, Ă  la suite des efforts hĂ©roĂŻques qu’elle venait de soutenir contre toute l’Europe. La funeste passion des succĂšs militaires dominait beaucoup moins Ă  la cour. Un prĂ©lat, modĂšle de vertu, de gĂ©nie et de piĂ©tĂ© tendre, attaquait, en chrĂ©tien autant qu’en homme d’État, la frĂ©nĂ©sie militaire c’était FĂ©nelon, archevĂȘque de Cambrai, et prĂ©cepteur du duc de Bourgogne. Par l’infidĂ©litĂ© d’un de ses domestiques, le TĂ©lĂ©maque avait paru ; et FĂ©nelon expiait par un exil dans son diocĂšse et par une Ă©ternelle sĂ©paration d’avec son royal Ă©lĂšve la composition de ce beau livre, oĂč Louis XIV crut voir une satire de son gouvernement. Le duc de Bourgogne, dont les vertus naissantes et dĂ©jĂ  fortes inspiraient du respect Ă  son aĂŻeul, se montrait attachĂ© aux principes de la politique toute morale de son instituteur. Les ducs de Chevreuse et de Beauvilliers, le marĂ©chal de Catinat, quoique heureux Ă  la guerre, et quelques magistrats Ă©clairĂ©s, inclinĂšrent fortement pour la paix, et proposĂšrent de renoncer au testament de Charles II, pour s’en tenir au traitĂ© de partage dĂ©jĂ  consenti par le roi. Louis avait soixante-deux ans, et pouvait difficilement supporter les fatigues de la guerre. Madame de Maintenon, dans ses sollicitudes pour la santĂ© du monarque, ne devait lui donner et ne lui donna sans doute que des conseils de paix. De toutes les fautes de Louis XIV, celle qui lui fut le plus entiĂšrement personnelle, celle dont la France et lui-mĂȘme portĂšrent le plus cruellement la peine, ce fut d’avoir repoussĂ© tant de sages conseils, et de s’ĂȘtre exposĂ© encore une fois aux chances de la fortune. Il accepta le testament de Charles II. L’Europe frĂ©mit, et s’arma. Louis parvint cette fois Ă  s’assurer deux alliĂ©s, les Ă©lecteurs de BaviĂšre et de Cologne. Il comptait Ă©galement sur le duc de Savoie, qui, un peu avant la paix de Ryswyck, avait mariĂ© l’une de ses filles au duc de Bourgogne, et qui scella bientĂŽt un nouveau lien avec la France par l’union de sa seconde fille avec ce mĂȘme duc d’Anjou, appelĂ© au trĂŽne de l’Espagne. Mais le duc de Savoie fut un des premiers Ă  entrer dans la ligue opposĂ©e, en calculant d’avance les avantages que la cour de France lui ferait pour l’en dĂ©tacher. De toutes les possessions de Charles II il n’y eut que l’Espagne oĂč les Français furent reçus avec quelque faveur. Dans la plupart des provinces de ce royaume, la noblesse et le clergĂ© s’étaient dĂ©clarĂ©s pour le petit-fils de Louis XIV. Le nouveau roi, Philippe V, dut sans doute cet avantage aux admirables instructions Ă©crites que lui donna son aĂŻeul. Elles nous ont Ă©tĂ© conservĂ©es et l’on peut y voir la profondeur et l’habiletĂ© de sa politique. Le style en est plein de noblesse et de fermetĂ©. Louis en avait su renfermer tout le fonds dans une parole sublime, que l’histoire rĂ©pĂ©tera toujours Partez, mon fils ; il n’y a plus de PyrĂ©nĂ©es ». La Catalogne, jalouse de recouvrer des privilĂšges depuis longtemps envahis par l’autoritĂ© despotique des rois d’Espagne, annonçait seule un mouvement contraire aux vues de Louis XIV et aux intĂ©rĂȘts de son petit-fils ; mouvement redoutable, puisqu’il avait la libertĂ© pour mobile. L’Italie se souvenait trop de nos anciens combats pour recevoir les Français sans dĂ©fiance. Durant trois annĂ©es, les Ă©vĂ©nements militaires parurent encore assez dignes de l’ancienne gloire de Louis XIV. A la vĂ©ritĂ©, le marĂ©chal de Villeroi se laissa surprendre et faire prisonnier dans CrĂ©mone ; mais les Français, indignĂ©s, repoussĂšrent l’ennemi et restĂšrent maĂźtres de la place, sans pouvoir dĂ©livrer leur gĂ©nĂ©ral. Louis dut certainement regarder comme le plus heureux prĂ©sage pour cette guerre la mort de Guillaume, roi d’Angleterre, et stathouder de Hollande, de cet ennemi opiniĂątre et froidement intrĂ©pide. Mais la fortune lui suscitait deux ennemis plus dangereux encore, dont les talents avaient plus d’éclat et la haine plus de profondeur c’étaient le prince EugĂšne et Marlborough. Le premier Ă©tait, par sa mĂšre, petit-neveu du cardinal Mazarin. DĂ©jĂ  il s’était distinguĂ© dans les guerres de l’Autriche contre les Turcs ; il s’annonça en Italie par le savant passage de l’Oglio et la victoire de Chiari. Le duc de VendĂŽme ne se montra point indigne d’un si puissant adversaire. Pendant deux ans, ils se firent une guerre savante et peu dĂ©cisive. Marlborough Ă©tait animĂ© d’une haine encore plus vive contre la France. Courtisan de Jacques II, il avait abandonnĂ© ce prince dans son malheur, et s’était rangĂ© parmi ses plus implacables ennemis. Il sentait le besoin de couvrir le tort de cette dĂ©fection par une grande dĂ©monstration de zĂšle pour la libertĂ©, et surtout par la gloire. On le voyait Ă  la fois diriger par ses intrigues les deux chambres du parlement d’Angleterre, la cour aimable et polie de la reine Anne, et les cabinets de l’Europe. BientĂŽt il sut conduire des armĂ©es, et supplĂ©er, par sa bravoure, par son impĂ©tuositĂ© et la vivacitĂ© de son coup d’Ɠil, Ă  l’étude profonde de l’art militaire. Les Français venaient de cĂ©lĂ©brer trois victoires nouvelles, celles de Friedlingen et de Hochstett, dues au marĂ©chal de Villars, et celle de Spire, due au marĂ©chal de Tallard. De la BaviĂšre qui leur Ă©tait ouverte, ils Ă©taient prĂȘts Ă  s’élancer sur l’Autriche, lorsque EugĂšne et Marlborough vinrent se concerter pour la dĂ©fense de l’empereur. Les Français n’étaient plus commandĂ©s par Villars, et se trouvaient dans la mĂȘme ville d’Hochstett, que ce gĂ©nĂ©ral avait illustrĂ©e par une victoire. Ils combattaient avec les Bavarois mais l’armĂ©e de Marlborough et EugĂšne parvint par ses manƓuvres Ă  les sĂ©parer de leurs auxiliaires. Tallard ne sut se dĂ©fendre qu’avec un aveugle courage. TournĂ© dans toutes ses positions, il est fait prisonnier ; vingt-deux de ses bataillons ont posĂ© les armes ; le champ de bataille est couvert de 12 000 Français. L’électeur de BaviĂšre fuit en dĂ©sordre ; ses États sont envahis, mis au pillage les Français sont chassĂ©s et poursuivis jusque dans l’Alsace. La fortune de Louis XIV n’avait encore Ă©tĂ© traversĂ©e que par de lĂ©gers Ă©checs promptement rĂ©parĂ©s. Il ne parut point abattu de ce grand dĂ©sastre ; mais l’ñge, sans avoir affaibli la vigueur de son caractĂšre, ne lui laissait plus cette activitĂ© qui avait Ă©tĂ© un si puissant aiguillon pour ses armĂ©es. Du fond de Versailles, et de concert avec quelques vieux gĂ©nĂ©raux, quelquefois mĂȘme avec des commis, il traçait des plans de campagne, et se flattait de pouvoir diriger Ă  la fois des opĂ©rations sur le Tage, sur le PĂŽ, sur le Danube et sur la Meuse. Tout le systĂšme militaire auquel il avait dĂ» l’éclat de ses armes Ă©tait rompu, parce que les Français agissaient trop loin de leurs magasins. Louis occupait le marĂ©chal de Villars Ă  combattre des paysans dans les CĂ©vennes, tandis qu’il confiait une nouvelle armĂ©e Ă  Villeroi, dont le nom, depuis la surprise de CrĂ©mone, Ă©tait devenu un objet de dĂ©rision pour l’armĂ©e aussi les Pays-Bas Ă©chappĂšrent-ils bientĂŽt Ă  ce monarque. Villeroi y perdit la bataille de Ramillies, journĂ©e plus sanglante, plus honteuse et plus dĂ©cisive que celle de Hochstett. Louis XIV avait Ă  se reprocher un choix imprudent ; il le sentit, et il eut la noblesse d’ñme de ne point faire de reproches Ă  Villeroi. Monsieur le marĂ©chal, lui dit-il, on n’est pas heureux Ă  notre Ăąge ». On Ă©prouva encore dans les Pays-Bas un Ă©chec Ă  Oudenarde, quoique le duc de VendĂŽme y commandĂąt, et que le duc de Bourgogne y fĂ»t prĂ©sent. Enhardi par ses succĂšs, le prince EugĂšne mit le siĂšge devant Lille, qui, aprĂšs dix mois de la plus hĂ©roĂŻque dĂ©fense, ne se rendit que par l’épuisement des vivres et des munitions. Vers le mĂȘme temps nous perdions l’Italie. Le prince EugĂšne força les Français dans les lignes qu’ils occupaient devant Turin 1708, et il osa faire des incursions dans la Provence et le DauphinĂ©. En Espagne, on avait aussi essuyĂ© des revers Philippe V avait Ă©tĂ© forcĂ© de fuir de Madrid, Ă  l’approche de l’archiduc, secondĂ© par les Catalans. Mais le marĂ©chal de Berwick Ă©tait parvenu Ă  y ramener le roi, en gagnant la bataille d’Almanza. Le dĂ©sordre des finances Ă©tait au comble. Louis ajoutait encore au chagrin de sa vieillesse, aux ennuis de sa cour, l’accablant ennui des controverses religieuses. Enfin la nature semblait aussi se dĂ©chaĂźner contre la France une seule nuit de l’hiver de 1709 fit pĂ©rir les oliviers, les vignes, beaucoup d’arbres fruitiers et, pour comble de dĂ©sastre, une grande partie des blĂ©s fut gelĂ©e. Louis vit la misĂšre de son peuple et demanda la paix, rĂ©signĂ© Ă  subir des conditions rigoureuses ; mais on se fit un plaisir de lui en prĂ©senter d’avilissantes ; on alla jusqu’à exiger qu’il envoyĂąt une armĂ©e en Espagne pour dĂ©trĂŽner son petit-fils. Puisqu’on veut, reprit Louis XIV, que je continue la guerre, j’aime mieux la faire Ă  mes ennemis qu’à mes enfants. » La France oublia ses propres malheurs pour compatir Ă  ceux de son roi. Les dĂ©faites des armĂ©es françaises furent rĂ©parĂ©es. La famine elle-mĂȘme faisait voler sous les drapeaux des milliers d’hommes qui n’espĂ©raient plus d’aliments qu’à la guerre la bataille de Malplaquet annonçait Ă  l’Europe ce que pouvait ĂȘtre le dĂ©sespoir des Français ; les marĂ©chaux de Villars et de Boufflers l’engagĂšrent prĂšs des murs de Mons contre EugĂšne et Marlborough ils furent repoussĂ©s, mais les ennemis durent dĂ©sespĂ©rer de la conquĂȘte de la France. Cette victoire leur avait coĂ»tĂ© 20 000 hommes tuĂ©s ou blessĂ©s, la perte des Français n’avait Ă©tĂ© que de 8 000 ; sans la blessure du marĂ©chal de Villars ils Ă©taient triomphants Boufflers avait conduit la retraite en bon ordre. Louis ne s’occupa plus qu’à nĂ©gocier avec ses ennemis sĂ©parĂ©ment ; toutes les mesures furent prises avec vigueur. Les flottes françaises osĂšrent s’approcher encore une fois des cĂŽtes de l’Angleterre. Deux intrĂ©pides armateurs, Duguay-Trouin et Jean Bart dĂ©solĂšrent le commerce de l’Angleterre, de la Hollande, de l’Espagne et du Portugal ; la prise de Rio de Janeiro, capitale du BrĂ©sil, immortalisa Duguay-Trouin, et rĂ©veilla le goĂ»t des brillantes aventures. Le duc de VendĂŽme fut envoyĂ© en Espagne au moment oĂč les Français venaient d’ĂȘtre battus devant Saragosse ; avec les dĂ©bris d’une armĂ©e fugitive, il obtint bientĂŽt la victoire de Villa-Viciosa ; et ce petit-fils de Henri IV Ă©tablit les Bourbons sur le trĂŽne d’Espagne. L’annĂ©e 1711 s’annonça dans la Flandre sous de tristes auspices. Le prince EugĂšne avait redoublĂ© de confiance et d’impĂ©tuositĂ© ; il s’empara de Bouchain, du Quesnoy, de Douai, et poussa des partis jusque dans la Champagne. Ce fut alors que Louis XIV profĂ©ra ces belles paroles Si je ne puis obtenir une paix Ă©quitable, je me mettrai Ă  la tĂȘte de ma brave noblesse et j’irai m’ensevelir sous les dĂ©bris de mon trĂŽne. » Villars trouva d’autres ressources que celles du dĂ©sespoir. Cet habile et heureux guerrier, qu’on opposait enfin au prince EugĂšne, feignit l’inaction. Pendant ce temps, la politique de Louis XIV agissait ; il Ă©tait parvenu Ă  dĂ©tacher la reine Anne de la ligue victorieuse. et avait signĂ© avec elle une suspension d’armes, en lui laissant Dunkerque pour gage. EugĂšne, qui s’occupait du siĂšge de Landrecies, avait mal Ă©tabli les communications entre les quartiers de son armĂ©e Villars profita de cette faute avec autant d’habiletĂ© que d’hĂ©roĂŻsme ; et le seul combat de Denain rĂ©para l’effet de six grandes batailles perdues. L’armĂ©e hollandaise y fut entiĂšrement dĂ©truite ; Landrecies fut dĂ©livrĂ©e ; Douai, le Quesnoy furent repris en peu de temps. DĂšs lors, le Hollande cessa de mettre obstacle Ă  la paix que voulait l’Angleterre. Les confĂ©rences s’ouvrirent Ă  Utrecht ; les nĂ©gociateurs français, parmi lesquels surtout il faut distinguer Torey, firent des prodiges d’habiletĂ© ; l’Angleterre et l’Europe consentirent qui l’aurait cru ? Ă  laisser le petit-fils de Louis XIV sur le trĂŽne d’Espagne. L’empereur se refusait encore Ă  traiter sur une telle base ; Villars, pour l’y dĂ©cider, vint Ă  la rencontre du prince EugĂšne sur un autre champ de bataille, força ses lignes devant Fribourg, et fit sous ses yeux de rapides conquĂȘtes en Allemagne. L’empereur craignit de laisser Ă©couler le temps oĂč il pouvait encore recueillir quelques fruits de ses prĂ©cĂ©dentes victoires. EugĂšne et Villars passĂšrent alors du rĂŽle de gĂ©nĂ©raux Ă  celui de nĂ©gociateurs. Louis XIV, par la paix d’Utrecht 1713, n’eut aucun sacrifice important Ă  faire, si ce n’est la dĂ©molition du port de Dunkerque ; Lille rentra sous la domination française. Les alliĂ©s s’indemnisĂšrent par le partage des diverses possessions excentriques de l’Espagne. Une telle paix Ă©tait infiniment plus utile que celle de Ryswick, qui avait suivi tant de victoires. Louis XIV avait dĂ©ployĂ© une vĂ©ritable grandeur dans ses adversitĂ©s ; qu’on examine toute sa conduite depuis 1709, on y verra toutes les ressources d’un grand et profond caractĂšre. L’art avec lequel il sĂ©para ses ennemis triomphants doit ĂȘtre considĂ©rĂ© comme le chef-d’Ɠuvre de la politique. Mais ce roi, qui Ă©tait ainsi parvenu Ă  dompter la fortune, Ă©tait alors le plus malheureux des pĂšres. Trois gĂ©nĂ©rations sorties de son sang avaient disparu dans l’espace de quelques mois ; le dauphin, Ă©lĂšve de Bossuet et de Montausier, mourut en 1711 Ă  l’ñge de 10 ans. Quoiqu’il fĂ»t certain que la petite vĂ©role avait causĂ© la mort de ce prince, il y eut quelque rumeur d’emprisonnement, et l’on affecta de diriger des soupçons sur le duc d’OrlĂ©ans, neveu du roi, prince d’un courage brillant, d’un esprit aimable, mais de mƓurs corrompues. Au mois de fĂ©vrier 1712, un mal qui avait tous les effets d’une Ă©pidĂ©mie et que l’on nommait rougeole pourprĂ©e, frappa et enleva plus de cinq cents personnes, dont quelques-unes Ă©taient du rang le plus distinguĂ© ; la duchesse de Bourgogne en fut atteinte cette princesse avait seule le privilĂšge d’égayer et d’embellir une cour attristĂ©e par l’ñge et par les malheurs du monarque. Louis XIV et madame de Maintenon, Ă©galement sĂ©duits par ses grĂąces divines, son enjouement et ses maniĂšres caressantes, en avaient fait leur fille chĂ©rie. Les progrĂšs du mal furent rapides ; le duc de Bourgogne, qu’on nommait alors le dauphin, rendait Ă  la duchesse les plus tendres soins, et dĂ©jĂ  il portait sur son visage les symptĂŽmes de cette cruelle maladie. La dauphine expira le 12 fĂ©vrier. Le roi s’était retirĂ© avec madame de Maintenon Ă  Marly, pour allĂ©ger, par des mĂ©ditations religieuses, le poids de sa profonde affliction. Le dauphin eut la force de venir se prĂ©senter devant son aĂŻeul mais il le glaça d’effroi par l’expression concentrĂ©e de sa douleur, et par les signes trop caractĂ©risĂ©s d’une maladie prochaine. Le roi lui parla avec la plus vive Ă©motion ; il n’était personne qui pĂ»t contenir ses larmes. Le prince que FĂ©nelon avait si bien formĂ© d’aprĂšs sa belle Ăąme et son brillant gĂ©nie, mourut le 18 fĂ©vrier. L’aĂźnĂ© de ses deux fils, le duc de Bretagne, ne lui survĂ©cut que deux jours ; le second, le duc d’Anjou depuis Louis XV Ă©tait dangereusement malade. Une mĂȘme cĂ©rĂ©monie funĂšbre rĂ©unit l’époux, l’épouse et leur fils. A la vue de ce dĂ©plorable spectacle, le peuple fut Ă©perdu dans sa douleur, et injuste dans ses soupçons. On parlait d’empoisonnement ; le duc d’OrlĂ©ans entendit de son palais les cris publics qui le nommaient empoisonneur la cour l’accusait avec moins d’animositĂ© et plus de perfidie. Toutes ces rumeurs sinistres semblaient autorisĂ©es par la dĂ©claration des mĂ©decins, qui, Ă  l’ouverture des trois cadavres, avaient cru reconnaĂźtre les effets du poison. Le roi fut Ă©branlĂ©, mais il eut la force de rĂ©sister Ă  ses propres prĂ©ventions contre un neveu dont il connaissait les principes dissolus et irrĂ©ligieux. Le duc d’OrlĂ©ans, dĂ©sespĂ©rĂ©, vint demander au roi que la Bastille lui fĂ»t ouverte. Louis craignit un Ă©clat qui pouvait ajouter beaucoup aux malheurs de la France ; le chimiste Homberg, que l’on accusait d’avoir fourni les poisons employĂ©s par le duc d’OrlĂ©ans, demandait vivement de prouver son innocence par une instruction juridique. Le roi avait paru d’abord consentir Ă  l’offre gĂ©nĂ©reuse du savant calomniĂ© ; mais lorsque celui-ci vint se prĂ©senter Ă  la Bastille, elle lui fut fermĂ©e. Depuis, Louis XIV ne se permit jamais un mot, un geste qui pĂ»t autoriser ou rĂ©veiller les injustes soupçons Ă©levĂ©s contre le duc d’OrlĂ©ans. Il lui restait encore une nouvelle perte, un nouveau coup Ă  supporter les fĂȘtes par lesquelles on cĂ©lĂ©brait une paix qui allait rĂ©parer un si long cours de flĂ©aux, ces fĂȘtes n’étaient pas terminĂ©es, lorsqu’on apprit la mort subite du duc de Berry, troisiĂšme petit-fils du roi. Il avait Ă©pousĂ© la fille du duc d’OrlĂ©ans, et cette princesse l’avait continuellement dĂ©solĂ© par les emportements de son caractĂšre et l’éclat scandaleux de ses intrigues. Ce prince, en expirant, dĂ©clara qu’il Ă©tait la seule cause de sa mort. Il avait fait une chute Ă  la chasse quelques mois auparavant ; il l’avait dissimulĂ©e, et s’était livrĂ© depuis Ă  des excĂšs d’intempĂ©rance. Le roi, par sa conduite envers la duchesse de Berry et envers le duc d’OrlĂ©ans, ferma, autant qu’il put, l’accĂšs Ă  de nouveaux soupçons. Louis goĂ»tait bien mal les douceurs de la paix. La plaie faite Ă  ses finances par les deux guerres terminĂ©es l’une Ă  Ryswick et l’autre a Utrecht, semblait incurable. Le poids des impĂŽts Ă©tait excessif ; et, malgrĂ© tous les soins de l’habile contrĂŽleur gĂ©nĂ©ral Desmarets, il fallait encore, comme pendant la guerre, subir la loi des traitants. La destruction de Port-Royal, en 1709, avait excitĂ© les plaintes lĂ©gitimes des nombreux amis de ces pieux solitaires. L’affaire de la bulle Unigenitus Ă©chauffa encore davantage les esprits on attribua la conduite du roi, dans ces deux circonstances, aux conseils de son confesseur. Le parlement et quelques Ă©vĂȘques osaient, pour la premiĂšre fois, rĂ©sister aux volontĂ©s de Louis XIV. Son Ăąge et ses derniers revers encourageaient une opposition qui entrevoyait un esprit bien diffĂ©rent sous un rĂ©gent dont les opinions Ă©taient connues. Les jeunes gens se lassaient d’une cour qui n’était plus Ă©gayĂ©e par les illusions de la gloire et par l’éclat des fĂȘtes. Le roi, plus renfermĂ© dans son intĂ©rieur, n’imposait plus autant Ă  un peuple accoutumĂ© Ă  tant de prospĂ©ritĂ©s. Lui-mĂȘme il semblait dĂ©mentir la rigiditĂ© nouvelle de ses principes par les honneurs excessifs dont il comblait les princes lĂ©gitimĂ©s, c’est-Ă -dire le duc du Maine et le comte de Toulouse, nĂ©s d’un double adultĂšre. Ces deux princes, par des qualitĂ©s plus aimables que brillantes, mĂ©ritaient l’affection de leur pĂšre ; mais la morale, la religion et le droit public des Français furent enfreints par la dĂ©claration du 25 mai 1715, qui les appelait Ă  la couronne au dĂ©faut de princes du sang. Le peuple souffrait beaucoup de la fin de ce long rĂšgne, dont les prospĂ©ritĂ©s l’avaient Ă©bloui pendant plus de quarante annĂ©es. Le 25 aoĂ»t 1715, jour de la Saint-Louis, le roi, au milieu des hommages qu’il recevait, se sentit griĂšvement indisposĂ©. Le lendemain, en visitant une plaie que ce prince avait Ă  la jambe, le chirurgien MarĂ©chal dĂ©couvrit la gangrĂšne ; son Ă©motion frappa le monarque. Soyez franc, dit-il Ă  MarĂ©chal, combien de jours ai-je encore Ă  vivre ? - Sire, rĂ©pondit MarĂ©chal, nous pouvons espĂ©rer jusqu’à mercredi. - VoilĂ  donc mon arrĂȘt prononcĂ© pour mercredi », reprit Louis sans tĂ©moigner la moindre Ă©motion. Il s’entretint avec le duc d’OrlĂ©ans qui allait ĂȘtre appelĂ© Ă  prĂ©sider le conseil de rĂ©gence. Le lendemain il se fit amener le duc d’Anjou, son arriĂšre-petit-fils, ĂągĂ© de cinq ans, et lui adressa ces paroles qui caractĂ©risent bien ce monarque Admirable en sa vie et plus grand dans sa mort. Mon enfant, lui dit-il, vous allez ĂȘtre un grand roi. Ne m’imitez pas dans le goĂ»t que j’ai eu pour la guerre. Tachez d’avoir la paix avec vos voisins. Rendez Ă  Dieu ce que vous lui devez ; faites-le honorer par vos sujets. Suivez toujours les bons conseils ; tĂąchez de soulager vos peuples, ce que je suis assez malheureux de n’avoir pu faire. N’oubliez jamais la reconnaissance que vous devez Ă  madame de Ventadour. » Et se tournant vers elle Je ne puis assez vous tĂ©moigner la mienne. - Mon enfant, je vous donne ma bĂ©nĂ©diction de tout mon cƓur. Madame, que je l’embrasse. » On approcha de ses bras cet enfant qui fondait en larmes, et il lui donna de nouveau sa bĂ©nĂ©diction. Dans la mĂȘme journĂ©e, Louis XIV s’adressa en ces termes Ă  tous ses officiers rassemblĂ©s autour de lui Messieurs, vous m’avez fidĂšlement servi. Je suis fĂąchĂ© de ne vous avoir pas mieux rĂ©compensĂ©s que je n’ai fait ; les derniers temps ne me l’ont pas permis. Je vous quitte avec regret. Servez le Dauphin avec la mĂȘme affection que vous m’avez servi. C’est un enfant de cinq ans, qui peut essuyer bien des traverses ; car je me souviens d’en avoir beaucoup essuyĂ© dans mon jeune Ăąge. Je m’en vais ; mais l’État demeurera toujours ; soyez-y fidĂšlement attachĂ©s, et que votre exemple en soit un pour mes autres sujets. Suivez les ordres que mon neveu vous donnera ; il va gouverner le royaume j’espĂšre qu’il le fera bien. J’espĂšre aussi que vous ferez votre devoir, et que vous vous souviendrez quelquefois de moi ». A ces paroles, des pleurs coulĂšrent de tous les yeux. Peu d’heures aprĂšs, Louis ayant tĂ©moignĂ© qu’il avait besoin de repos, la cour fut comme dĂ©serte. Madame de Maintenon, loin d’abandonner le roi, comme le lui reproche Saint-Simon, passa cinq jours dans la ruelle de son lit, presque toujours en priĂšres. Il eut avec elle un entretien touchant, oĂč il lui rĂ©pĂ©ta plusieurs fois Qu’allez-vous devenir ? Vous n’avez rien. » Elle ne partit pour Saint-Cyr, le vendredi 30 aoĂ»t, Ă  cinq heures du soir, que lorsqu’il eut tout Ă  fait perdu connaissance. Pourquoi pleurez-vous, disait-il Ă  ses domestiques ; m’avez-vous cru immortel ? » Il nomma le Dauphin, le jeune roi ; il lui Ă©chappa de dire Quand j’étais roi ». Il mourut Ă  Versailles le 1er septembre 1715, ĂągĂ© de 77 ans ; il en avait rĂ©gnĂ© 72. Ce monarque supplĂ©a par un grand caractĂšre aux dons d’un grand gĂ©nie ; tout ce qu’il conçut, tout ce qu’il exĂ©cuta de plus heureux, de plus habile, pendant les annĂ©es triomphantes de son rĂšgne, fut un dĂ©veloppement et une amĂ©lioration des plans et des actes du cardinal de Richelieu. Celui-ci, inquiet sur une autoritĂ© prĂ©caire et en quelque sorte usurpĂ©e, fut souvent sanguinaire Louis XIV fonda bien moins sur la terreur que sur l’admiration l’autoritĂ© absolue dont il avait reçu l’hĂ©ritage ; mais, par l’inĂ©vitable danger d’un pouvoir sans limites, il fut souvent dur ; les prĂ©jugĂ©s de son rang et de son siĂšcle le rendirent quelquefois injuste sans remords. Il ajouta mille sĂ©ductions Ă  l’art de rĂ©gner ; il le purgea des froides scĂ©lĂ©ratesses du machiavĂ©lisme. On dirait que le mot de majestĂ© fut créé pour lui. On a eu tort de le juger d’aprĂšs deux ou trois anecdotes assez suspectes. Quand il lui serait arrivĂ© d’admirer et d’envier le gouvernement turc, ce qu’il y a de certain c’est qu’il n’eut jamais la stupide maladresse de l’imiter. Il trouva le secret de tout subordonner sans avilir aucun ordre de l’État, sans dĂ©grader aucun caractĂšre. Il permit Ă  plusieurs hommes d’ĂȘtre grands et mĂȘme plus grands que lui. Le tiers Ă©tat ne reçut pas moins de lui que de ses prĂ©dĂ©cesseurs ; car il n’y eut pas sous son rĂšgne un seul grand emploi auquel des plĂ©bĂ©iens ne parvinssent ; tout vint figurer sur le vaste théùtre de gloire ouvert par Louis XIV. L’industrie, les richesses et surtout le gĂ©nie Ă©levĂšrent par degrĂ©s le tiers Ă©tat jusqu’à la puissance foudroyante qu’il dĂ©veloppa sur la fin du XVIIIe siĂšcle. Nous nous garderons bien de donner des Ă©loges trop absolus Ă  un roi qui s’est dĂ©clarĂ© coupable d’avoir trop aimĂ© la guerre ; mais quelles que soient ses fautes, la nation française ne peut pas oublier qu’elle lui doit sur tous les points, hormis en ce qui concerne la libertĂ© politique, le rang qu’elle occupa ensuite dans le monde.
Lagence de pompes funĂšbres ROC ECLERC Ă  Dunkerque se situe Ă  200m de la mairie de RosendaĂ«l. Elle est accessible par bus : C5 et 14 (arrĂȘt : Paul Machy) Horaires d'ouverture : lundi au samedi (9h-12h et 14h-18h) - Permanence tĂ©lĂ©phonique : 7j/7 et 24h/24 - Places de stationnement Ă  proximitĂ© L'Ă©quipe vous accompagne et vous conseille dans tous les
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MmeDanielle Joly née Lepretre. survenu le 04 juillet 2022 à l'ùge de 83 ans. Ses funérailles religieuses seront célébrées le vendredi 08 juillet 2022, à 14 heures 30, en l'église Saint-Eloi de Dunkerque, suivies de l'inhumation au cimetiÚre de Coulogne (62), dans le caveau de famille. Réunion à l'église à 14 heures 25.

Publié le 21/06/2021 M. Christian LEDUC De Bourbourg, 59630 Décédé le 14 juin 2021 à l'ùge de 69 ans Voir l'avis de décÚs De Estaires, 59940 le 15 juin 2021 à l'ùge de 97 ans Voir l'avis de décÚs Publié le 15/06/2021 M. Hervé DEBLOCK De Dunkerque, 59240 Décédé le 14 juin 2021 à l'ùge de 65 ans Voir l'avis de décÚs De Bourbourg, 59630 Décédée le 12 juin 2021 à l'ùge de 74 ans Voir l'avis de décÚs Publié le 15/06/2021 Mme Roberte LELEU De Merville, 59660 Décédée le 13 juin 2021 à l'ùge de 94 ans Voir l'avis de décÚs Publié le 15/06/2021 M. Christophe FROMENT De Estaires, 59940 Décédé le 14 juin 2021 à l'ùge de 55 ans Voir l'avis de décÚs Publié le 12/06/2021 M. Jean-Paul COUPET De Merville, 59660 Décédé le 12 juin 2021 à l'ùge de 83 ans Voir l'avis de décÚs Publié le 12/06/2021 M. Claude LELEUX De Coudekerque-Branche, 59210 Décédé le 11 juin 2021 à l'ùge de 75 ans Voir l'avis de décÚs Rechercher un avis de décÚs

ï»żAvisde dĂ©cĂšs; Contrat obsĂšques; Avis de dĂ©cĂ©s. Accueil Avis de dĂ©cĂ©s . Vous servir dans le respect est une volontĂ© de chaque jour. VoilĂ  pourquoi nous sommes attentifs Ă  rĂ©pondre Ă  vos attentes. Nous contacter. Assistance DĂ©cĂšs - 24h/24 - 7j/7 03 28 64 40 44 contact@ 10 Rue Gustave Fontaine, 59210 Coudekerque-Branche Horaires d'agence : Demandez votre estimation d'obsĂšques ou de marbrerie en ligne PortĂ©s par des valeurs de partage, de respect et d’excellence, nous nous engageons Ă  fournir des prestations de grande qualitĂ© aux prix les plus justes. DĂ©couvrez nos services et produits Services aux familles Notre entreprise met Ă  votre disposition des services pour simplifier votre contribution aux obsĂšques et vous permettre de vivre plus sereinement votre deuil. EN SAVOIR PLUS Organiser des obsĂšques Dans le cadre du dĂ©cĂšs d’un proche, de nombreuses dĂ©marches doivent ĂȘtre entreprises afin d’organiser les funĂ©railles. Retrouvez ci-dessous toutes les informations nĂ©cessaires afin de comprendre l’organisation des obsĂšques. EN SAVOIR PLUS Demande de devis marbrerie Le monument funĂ©raire est un lieu hautement symbolique puisqu’il reprĂ©sente la derniĂšre demeure du dĂ©funt. Nous proposons un monument unique qui reflĂ©tera au mieux la personnalitĂ© du dĂ©funt. EN SAVOIR PLUS L’entreprise de POMPES FUNÈBRES LUCIEN DUBOIS est situĂ©e Ă  Raimbeaucourt 59 Ă  proximitĂ© de Douai. Nous vous proposons de vous assister dans l’organisation de funĂ©railles en Ă©tant Ă  votre Ă©coute et en vous offrant un service professionnel. Nous nous occupons des services funĂ©raires ainsi que de toutes dĂ©marches Administratives.
Voustrouverez ci-dessous la liste des avis de décÚs publiés dans la commune de Dunkerque, ainsi que les avis de messe, les remerciements, les avis souvenir et les hommages.Vous aurez plus de détail en cliquant sur le nom du défunt.
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Lagence funéraire POMPES FUNÈBRES DE FRANCE de Montereau-Fault-Yonne vous apporte son assistance pour vous aider à gérer la perte d'un proche. Elle intervient sur la commune de Montereau-Fault-Yonne et ses alentours 24h sur 24 et 7j sur 7, avec ou sans rendez-vous. Des formules adaptées à toutes les situations sont proposées et son équipe est à votre écoute
De Hasnon, 59178 Décédée le 14 août 2022 à l'ùge de 81 ans Voir l'avis de décÚs De Gravelines, 59820 le 14 août 2022 à l'ùge de 95 ans Voir l'avis de décÚs De Orchies, 59310 Décédé le 13 août 2022 Voir l'avis de décÚs De Maing, 59233 Décédée le 12 août 2022 Voir l'avis de décÚs Publié le 12/08/2022 M. Denis DELVILLE De Merville, 59660 Décédé le 11 août 2022 Voir l'avis de décÚs Publié le 12/08/2022 M. André DELATTRE De Wormhout, 59470 Décédé le 12 août 2022 à l'ùge de 94 ans Voir l'avis de décÚs De Flines-lÚs-Mortagne, 59158 Décédée le 11 août 2022 à l'ùge de 91 ans Voir l'avis de décÚs De Vieux-Berquin, 59232 Décédée le 9 août 2022 à l'ùge de 96 ans Voir l'avis de décÚs Rechercher un avis de décÚs 9AMPf.
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